« Connaître quelqu’un depuis l’enfance, c’est avoir assisté à la naissance de ses rêves, à leur réalisation ou à leur effondrement, c’est avoir eu accès à ses plus grands espoirs et à ses peurs les plus intimes à l’état brut, avant que la domestication sociale n’ait fait son œuvre. »

Marie Vareille

« Vous me faites souvenir que l'enthousiasme est une fleur de la jeunesse, dont le désenchantement est le fruit. »

 Dumas père, Angèle

Pour les dictionnaires, il s’agit de la perte d'une illusion; de l’état d'une personne qui se désenchante en découvrant une réalité dépouillée de son caractère charmant ou mystérieux. Ils le rapprochent aux notions de déception, déconvenue, désappointement, dégoût, désabusement, désespérance, désillusion, désintérêt.

L'expression de Max Weber « désenchantement du monde » désigne le processus de recul des croyances au bénéfice des explications scientifiques. 

La paternité de l'expression lui est attribuée, il l'utilise à quatre reprises en 1904 dans son essai « L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme ».

Pour Weber, il signifiait une perte de sens et un déclin des valeurs, du fait que le processus de rationalisation dicté par l'économie tend de plus en plus à imposer ses exigences aux humains.

L'idée de désenchantement a une longue histoire intellectuelle et se rapporte souvent à un sentiment de perte d'idéaux ou de foi dans des visions du monde antérieurement tenues et entretenues. 

La notion de désenchantement renvoie à l’idée de dissolution d'un monde harmonieux et confortable, d’où la quête d’une nouvelle harmonie, sinon d’une nouvelle illusion charmante..

Les "désenchantés" sont des individus qui, après avoir cru passionnément en certaines idées ou idéaux, se retrouvent confrontés à la réalité qui ne correspond pas à ces convictions, entraînant une désillusion.

Dans le contexte spécifique du XXe siècle et des désenchantés de la gauche, le terme fait souvent référence à ceux qui avaient adopté des idéologies telles que l'humanisme, le marxisme, le maoïsme, ou d'autres formes de pensée socialiste et communiste. Après avoir été témoins des échecs ou des excès des régimes se réclamant de ces idéologies (comme l'Union soviétique ou la Chine de Mao), beaucoup ont ressenti une profonde désillusion et une remise en question de leurs croyances.

Après la chute du mur de Berlin en 1989 et l'effondrement du bloc soviétique, beaucoup de militants de gauche ont vécu un véritable désenchantement. Ils ont dû faire face à l'échec du modèle communiste tel qu'il avait été mis en pratique, à ses atrocités, à ses suppressions de libertés individuelles et à ses échecs économiques.

Dans le monde arabo-musulman, ils ont dû en plus  accepter le fait religieux. Parfois et pour certains, l’épouser comme un remède de substitution.

Les réactions à ce désenchantement ont donc été variées. Dans la perspective d’un futur et nouveau désenchantement : 

Certains ont renoncé à toute idéologie en se détournant complètement de la politique, tandis que d'autres ont cherché à reformuler leurs croyances politiques. 

On en connait quelques-uns. Ceux qui ont eu la lucidité et le courage de l’écrire.

Certains se sont tournés vers une droite plus modérée ou une gauche plus fade et plus tiède, cherchant éventuellement à concilier les principes du libre marché avec une certaine préoccupation sociale. Une sorte d’accommodement, en tant que faire ce peut. 

D'autres se sont réorientés vers l'écologie ou les droits de l’Homme, comme un renouvellement de l'engagement envers des valeurs communes, la justice et le respect de l'environnement étant au cœur de cette préoccupation.

La cause des droits de l’homme, comme cause universelle, a été pour beaucoup de désenchantés un nouveau terrain où ils ont pu militer pour faire « progresser » le monde. La question des droits de la femme a pu rassembler beaucoup d’ex-militants de la gauche mais pas exclusivement. 

L'écologie politique, elle aussi, a pu être une voie alternative pour les personnes désenchantées de la gauche surtout en Europe, car elle propose un cadre de pensée qui critique également le modèle capitaliste et ses effets sur l'environnement, tout en offrant une vision positive d'un avenir plus durable et plus équitable.

On peut retrouver des ex-militants désenchantés dans ce que l’on appelle, chez nous, la société civile et qui englobe tout un tissu d’associations de volontaires de tout genre.

Il y a aussi des parcours individuels moins nobles.