Assassinat de S. Paty : RETOUR SUR UN BIG BANG

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Abdelhakim Sefrioui, un islamiste intégriste d'origine marocaine, devenu français par mariage, actif en France depuis la fin des années 1980. En 2004, il fonde le collectif Cheikh-Yassine, un mouvement pro-Hamas palestinien dissout le 20 octobre 2020 pour son implication présumée dans l'assassinat de Samuel Paty.

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Quand Mohamed Bouyeri, né à Amsterdam en 1978, assassinera, dans la même ville, Théo Van Gogh, cinéaste et descendant du peintre néerlandais, il ne se doutait pas qu’il serait à l’origine d’un big bang dont le dernier effet tectonique est la décapitation de Samuel Paty. 

Dans une expédition punitive, Bouyeri, ce néerlandais d’origine marocaine, usera d’une cruauté méthodique pour achever sa victime. Il l’égorgera, en pleine rue, après lui avoir tiré dessus. Avant de repartir tranquillement, il plantera sur la poitrine de sa victime gisante, un message destiné à la députée Aylan Hisri Ali. Bouyeri entendait ainsi châtier le saltimbanque néerlandais pour avoir commis une œuvre, Submission, un court métrage tiré de l’écrit d’Ayan Hisri Ali, exagérément jugé outrageant pour l’Islam. Bien avant que DEACH nous inflige des atrocités innommables, ce crime, et surtout les moyens employés, est un acte fondateur. Il est, en effet, le premier à commettre, sur le sol européen, un acte aussi infâme. Il provoquera dans toute l’Europe une immense sidération. Car outre l’abjection, son acte visait à mutiler la liberté d’expression. Le 26 juillet 2005, Bouyeri sera condamné à la prison à vie. Sans Bouyeri, il n’y aurait probablement jamais eu d’affaire « Charlie ».

Dans une soirée danoise de l’été 2005, probablement arrosée, l’écrivain Kare Bluitgen, un spécialiste de littérature pour adolescents, évoquera son projet d’un livre sur le prophète Mahomet. Homme de gauche et tiers-mondiste, il dira qu’au Danemark, « on dit beaucoup aux enfants d’immigrés d’apprendre la vie des héros danois. Mais les Danois doivent aussi apprendre la vie des héros de l’islam ». Il avait cependant un problème, c’est de trouver des illustrateurs pour accompagner son projet. Parmi les convives de la soirée danoise, il y avait un journaliste, Flemming Rose, responsable des pages culturelles du Journal Jyllands-Posten. A la rentrée de septembre. Il s’est rappelé de la soirée avec Kare Bluitgen. Il lui proposera une interview qu’il publiera. Dans la foulée, le quotidien saisira l’occasion pour mesurer les limites de l’autocensure et prendra contact avec le syndicat des caricaturistes danois, forte d’une quarantaine d’illustrateurs, avec une demande simple : « Si vous avez à représenter le prophète, que dessineriez-vous ?». Le quotidien recevra douze dessins plus ou moins marrants. L’un des dessins montre le prophète Mahomet, qui annonce aux terroristes islamistes que le « Paradis » est non seulement encombré mais qu’il est « en rupture de stock de vierges ». Une autre caricature, œuvre de Kurt Westergraad, représente Mahomet, coiffé d’un turban en forme de bombe, avec une mèche allumée. Cette dernière caricature sera l’une des plus controversée. Par la communauté musulmane danoise d’abord avant de l’être dans plusieurs pays musulmans où les islamistes avaient trouvé là une occasion de faire, habilement et sans se faire réprimer, une démonstration de force. 

En France, et pour la vérité historique, c’est le quotidien France soir, disparu depuis, qui le premier, reproduira les caricatures, le 1er février 2006. Jacques Lefranc, directeur de la publication sera limogé, le lendemain, par son patron Raymond Lakah. Pour marquer sa solidarité avec Jacques Lefranc, Charlie Hebdo décidera de publier à son tour les caricatures le 8 février 2006.  La veille de la sortie, les principales organisations musulmanes, Mosquée de Paris en tête, lanceront une procédure en référé contre Charlie Hebdo visant à empêcher la publication du numéro. Ils seront déboutés, pour vice de forme. Le journal sortira avec le titre « Mahomet débordé par les intégristes », on y voit un dessin de Cabu qui croque le prophète, la tête entre ses mains, en déplorant : « C’est dur d’être aimé par des cons. » Le numéro connaitra un énorme succès : 50 000 exemplaires seront vendus. 

En juillet, c’est-à-dire cinq mois plus tard, la Mosquée de Paris, à la tête d’une escouade d’associations musulmanes, intentera un procès à Charlie. C’est ici l’un des plus grands forfaits non de l’Islam mais de « ses responsables » en France. Cherif Kouachi, alors âgé de 24 ans, a dû suivre, avec son mentor Farid Benyettou, le procès dans les geôles. Tout le monde aura compris, il est inutile de revenir sur la suite tragique qui surviendra le 7 janvier 2015. 

Depuis l’équipée sauvage de Mohamed Merah qui avait, en 2012, ciblé les militaires et les juifs, les attaques terroristes se sont succédées, depuis 2015, avec un rythme soutenu n’épargnant aucune symbolique : la liberté d’expression (Charlie), une manière joyeuse de vivre ( Bataclan, terrasses parisiennes, Noël à Strasbourg), la fête nationale ( Nice), l’Eglise (le père Hamel), les forces de l’ordre ( Magnanville, la préfecture de police, le lieutenant-colonel Beltrame), les Juifs ( l’Hyper cacher, le musée Juif de Bruxelles), l’entreprise (le patron Hervé Comara décapité par Yassine Salhi). Ces attaques ont fait 264 morts. Elles ont lacéré les corps et les âmes. Elles sont toutes commise aux cris d’Allah ou Akbar. Exception faite de l’Antillais Mickaël Harpon ou du Malien Coulibaly, elles sont toutes commises pas de jeunes Maghrébins dont nombre de Marocains, nés ou grandis dans les territoires estropiés de la France ou de la Belgique.

Après « un été meurtrier » où, sur un fond de crise sanitaire, plusieurs faits divers, très graves pour certains, ont émaillés l’actualité française ; alors que le pays est en plein procès des attentats de 2015, c’est encore nom de l’Islam que le sang a coulé à cause des caricatures. Le 25 septembre, un pakistanais, faussement « mineur isolé », pris en charge par l’aide sociale à l’enfance, depuis son arrivé en France en 2018, s’est attaqué, à la machette, à deux femmes qui fumaient leurs cigarettes à proximité des anciens locaux de Charlie. Le 16 octobre, un professeur d’histoire-géographie sera, dans des circonstances atroces, décapité, non loin de son établissement. L’auteur est un jeune tchétchène qui a prémédité son attentat dans une inextricable et sordide machination contre ce prof. Qu’un Pakistanais et un tchétchène, d’immigration récente, commettent de tels forfaits non seulement marque une rupture dans le terrorisme endogène mais rend encore plus complexe et plus imprévisible la dynamique du terrorisme islamiste.

Ce crime-là a l’avantage de dévoiler une partie de l’écho système. Le bourreau n’avait pas derrière lui un état-major. Il n’a pas eu d’ordre de mission ni bénéficié de complicités directes. Il s’est tout simplement déployé dans un environnement où les messages, dans les réseaux sociaux, sont sibyllins. Dans une campagne qui ne disait pas son nom, Samuel Paty a été livré en pâture dans les réseaux sociaux, ce qui a donné une collaboration informelle où élèves, un père de famille, soutenu par militant, d’origine marocaine, très actif et dont le pédigrée est notoirement labelisé AOC de l’islamisme français. Chacun dans son rôle, ils ont échafaudé et exécuté une fatwa oblique et sacrilège qui éclaboussera de sang l’un des plus précieux sanctuaires français : l’école.