Elections américains : Le modèle démocratique à bout

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Le modèle démocratique le plus solide et le plus résilient qu’on connaisse souffre de son incapacité à préserver le plus important de ses fondamentaux : l’immunisation de la société contre la fracture.

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Le rideau est enfin tombé sur les élections américaines sonnant le glas du trumpisme, son populisme et ses méthodes de gestion politique. Se pose dès lors la question récurrente à chaque présidentielle qui consiste pour les pays tiers à prévoir les possibles changements qu’introduira le nouveau président élu, à identifier les pertes et les bénéfices et à déterminer les moyens d’adaptation à l’arrivée des démocrates.  

Si les décideurs politiques concentrent principalement leur attention sur les transformations que pourraient connaitre la politique étrangère de Washington, dans le souci de s’y adapter en fonction des intérêts propres à leurs Etats, nombre d’observateurs et d’analystes, y compris de hauts responsables gouvernementaux, sont aussi, et peut-être surtout, inquiets de la fracture entre les composantes  de la société américaine aussi bien qu’entre les différents cercles du pouvoir au point que la ministre de la défense allemande a mis en garde contre la possibilité  d’une explosion aux Etats Unis. 

Ainsi, l’essentiel dans les élections américaines n’est pas tant qui des démocrates ou des républicains va prendre la Maison Blanche, mais l’antagonisme violent que connait le plus solide et le plus fort des modèles démocratiques dans le monde débouchant sur une forme effroyable de division sociétale dont personne ne peut prédire l’issue. 

Nombre d’analystes et de penseurs, dont des Américains, appréhendent aujourd’hui le trumpisme, non plus comme une contingence, mais comme un phénomène plus profond qui a ses enjeux politiques, son discours populiste et sa philosophie raciste nourris des théories démographiques sur le régression de l’homme blanc au sein d’une société américaine où les minorités latino, africaine et asiatique prennent de plus en plus de place. 

L’essor des théories racistes et suprémacistes qui travaillent à la mobilisation de « l’élément blanc » et l’approfondissement de la fracture qui en résulte ne vont donc pas disparaitre avec le départ de Donald Trump de la Maison Blanche ou la régression de son influence sur le parti républicain.  C’est désormais une réalité qui atteste que le « grand vieux parti » n’a plus d’autre idéologie que ce racisme dont Trump a été le porteur plutôt que l’instigateur et qui peut déboucher sur des formes plus dramatiques.

La chancelière allemande Angela Merckel a bien perçu ce constat et mis en garde la société allemande contre la division, consciente qu’elle est que la modèle démocratique ne prémunit pas contre ce risque et ne dispose plus des mécanismes à même à d’y parer. 

Que déduire de cette situation sinon que le modèle démocratique le plus solide et le plus résilient qu’on connaisse souffre de son incapacité à préserver le plus important de ses fondamentaux : l’immunisation de la société contre la fracture. Ce principe la protection de société contre les démons de la division, fondement référentiel de la démocratie, s’en trouve désormais sous la menace des théories racistes qui, ce faisant, remettent sérieusement en cause le postulat de a pluralité comme ferment de l’unité, de la solidité et de la cohésion de tout vivre ensemble. 

Certains cherchent à minimiser le mal, jreetant la responsabilité sur quelque courants conservateurs ou d’extrême droite qui les couvent, ce qui n’est pas en soi nouveau. Plus payant et plus difficile est d’essayer d’appréhender pourquoi le modèle démocratique américain n’a pas pu les contenir ou les réduire afin d’en faire des groupes marginaux ou, au pire des cas, de les modérer pour les intégrer dans le jeu politique. Tout aussi nécessaire est de savoir comment ces courants ont pu prospérer dans un environnement démocratique dont les préceptes sont censés être inculqués aux générations futurs dans les manuels d’éducation et de formation. 

Les explications sont multiples, mais tant d’inefficacité trouve ses sources d’abord dans le paradigme philosophique du modèle capitaliste qui appelle plus que jamais une révision radicale. La démocratie, historiquement conçue pour réguler la lutte entre les élites, s’avère n’en être plus capable et a besoin aujourd’hui d’une refondation pour continuer à maintenir l’unité et la cohésion du peuple. Ce qui est loin d’être une tâche facile tant le paradigme philosophique du capitalisme, hostile à tout intervenant extérieur à lui-même pour mener semblable reconstruction, ne semble en avoir aucune envie. 

En attendant ce Godo réformateur qui viendra ou ne viendra pas, il y a lieu de retenir que ce qui se passe actuellement aux Etats Unis est d’autant plus sérieux que la gravité du problème apparait de façon encore plus aigüe en Europe. Sur le vieux continent, le même problème, déjà là, ne se présente pas sous les mêmes formes de races et d’ethnies générées par l’immigration. Mais de nationalismes sourds cramponnés à des tentacules historiques, linguistiques et culturels profondes qui ne manquent pas depuis un temps de se traduire par des revendications politiques ethnocentrées. Et il est à craindre que le jour où les démocraties européennes seront atteintes aussi profondément du même mal que les Etats Unis, la situation y sera, sans doute aucun, autrement plus dramatique. 

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