chroniques
Le Maroc, le Qatar et l’Eurogate – Par Naïm Kamal
José Bové et Aziz Akhannouch dans OSS 117, Bruxelles, nid d’espions
Par Naïm Kamal
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Allo, M. José Bovin ?
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Non, vous vous trompez monsieur, c’est José Bové, son cousin germain…
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Pardonnez la confusion, c’est justement à vous que je cherche à parler…
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Ouais….
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Voilà, (silence embarrassé) je suis Aziz Akhannouch, ministre de l’Agriculture, de la pêche et d’autres choses, et surtout futur chef de gouvernement du Maroc…
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Ouais, que me voulez-vous ?
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Que du bien, rassurez-vous, j’aimerais vous remettre un petit quelque chose, enfin vous voyez, un petit cadeau…
José Bové, allègue-il, feint d’accepter et donne une adresse où le ministre marocain pourrait le retrouver : ‘’ 36, Quai des Comptes et des Marquis, restaurant Adormirdebout.
Le ministre qui ne craint personne sinon Dieu, se rend himself à l’adresse indiquée, lunettes noires de Rapetou, son enveloppe pleine d’euros bien dissimulée sous son manteau, mais ne trouve rien. Il rappelle José.
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Allo José, il n’y a rien ni personne à l’adresse que tu m’as indiquée (ils en sont au tutoiement)…
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Si, tu y trouveras mon avocat…
Même dans une pièce de théâtre pour petites gens prêts à rire de tout et de rien, la scène ferait navet. Mais croyez-le ou pas, c’est ce que l’on peut ressortir de cette mauvaise pièce de théâtre à mi-chemin du vaudeville et de la Commedia italienne dell’arte, jouée téléphoniquement par le cher José Bové sur une station de radio française, avec quelques rajouts pour le burlesque de la situation que le personnage ne renierait pas.
’’Sa main dans la main de son frère’’
José Bové est un syndicaliste agriculteur, passé de mode, que sa moustache, sa pipe et son cassage au sens propre de Mc Do ont rendu célèbre. Personnalité hurluberlu, mythomane sur les bords, que ni sa faconde paysanne ni ses titres de gloire ne lui ont suffi pour avoir la liberté dans la foulée de parler des eurodéputés véreux qui peuplent les instances de l’UE à Strasbourg et à Bruxelles. A peine avait-il commencé qu’il est interrompu par le présentateur qui lui coupe la ligne, seulement intéressé par le Maroc via son actuel chef du gouvernement.
Il y a un proverbe marocain qui dit : ‘’sa main dans la main de son frère’’ pour signifier que ça ne s’arrête pas. Ce que l’on a appelé l’affaire d’espionnage au titre pittoresque de Pegasus, qui renvoie au cheval ailé de la mythologie grecque, s’essoufflant, on ressort une histoire de corruption où le Qatar et le Maroc se tiennent compagnie.
Pour l’Emirat de Tamim ben Hamad Al Thani, il s’agit comme on l’a vu et continue de le voir, de l’attribution de l’organisation de la coupe du monde 2022. Pour le Royaume de Mohammed VI c’est plus compliqué et plus ambigu.
Il s’agirait à la fois de la défense de ses intérêts au Sahara et des accords de partenariat Maroc – UE, ce qui fait rire un observateur avisé, Jalal Drissi, faisant remarquer que le Maroc se voit accusé de corrompre ou de tenter de corrompre des eurodéputés pour adopter des accords largement favorables à l’Europe et grandement désavantageux pour le Royaume.
Sur ce, le quotidien français Le Monde*, un abonné au Maroc et dont l’ancien ministre des Affaires étrangères de France, Hubert Védrine, a récemment dit qu’il n’était ‘’plus un journal de référence’’, entre en scène.
Comme le chien de Pavlov au son de la cloche, il salive dès qu’il est question du Royaume. Pour épicer le scénario et relever la réalisation, intervient dans son script, la DGED et son Yassine Mansouri, un mystérieux espion marocain déjà identifié dans une autre affaire mais jamais retrouvé (décidément les services français ce n’est plus ça), un ambassadeur marocain à Bruxelles aujourd’hui quelque part ailleurs, en un mot, des gens qui, même si ce dont on les accuse s’avère, font leur job, pas plus ni moins que leurs homologues d’en face**. Bref, on l’aura compris, au pire c’est un mauvais polar et au mieux du John Le Carré bas de gamme.
Demeure une question, ou plutôt deux : Pourquoi tient-on à associer Qatar et Maroc dans un même « gate » ? Est-ce parce que les deux pays, chacun dans son rayon, ont réussi leur coupe du monde, ou est-ce comme on dit au début des fictions, le produit du hasard, qui souvent fait mal les choses. La deuxième consiste à supposer que si effectivement le Qatar et le Maroc sont des corrupteurs contraints au procédé pour défendre leurs intérêts légitimes, les corrompus, eux, sont du coté de l’Europe et de Bruxelles, capitale européenne du lobbying***, appellation hypocrite de la corruption ! Pourquoi s’échine-t-on alors à parler de Qatargate et de Marocgate et non pas d’Eurogate, d’UEgate, ou, en ce qui Concerne Doha, de Michel Platinigate? Ni mystère ni boule de gomme. Seulement un toc activé par le désir maladivement obsessionnel de nuire. Et l’impudente arrogance de voir la paille dans l’œil du voisin et ne pas voir la poutre dans le sien.