Les opportunités du virus

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Accompagnés de symptômes trompeurs les remèdes ont tardé à se mettre en place. S’ils n’ont pu venir à bout du virus ils ont pour le moins pu en réduire la létalité. Si le monde d’avant découvre abasourdi l’étendue de ses décombres, il n’en a pas moins dicté les leçons du monde d’après. Elles formeront sans doute la trilogie de cette doctrine. 

- Il y a l’enseignement sanitaire : il peut être inquiétant car à différents degrés on se rend compte qu’il faudra vivre avec ce virus ou d’autres. 

- Il y a l’enseignement politique : il peut être défendable car les conditions de sécurité peuvent imposer des situations d’exception. (Pourvu qu’elles ne durent pas). 

- Il y a l’enseignement économique avec son lot d’opportunités dont on parlera.

Le dénominateur commun de ces trois est l’imprévisibilité du nouvel environnement. 

Qui l’aurait cru ? Nous avons changé de civilisation presque sans le savoir.  En créant plus de technologies nous avons créé plus de complexité. De ce fait, plutôt que prédire les conditions du nouvel environnement, il nous faudra créer les conditions pour résister à l’imprévisible car l’extraordinaire devient ordinaire. Voici donc la résultante : Tout fait ou évènement rare qui nous semblait soit lointain soit ne pas nous concerner devient plus fréquent et à la limite normal. 

Si les paradigmes vont changer nous devrons évoluer avec, en étant prêt à modifier nos choix en fonction des nouvelles contraintes. Ceci étant admis, il nous faudra être flexible et pragmatique afin d’apprendre à fonctionner dans un monde contradictoire. En somme il faudra « construire son chemin en marchant ». Ceci m’amène à affirmer que si parmi toutes les qualités à acquérir, je ne devais en garder qu’une : Ce serait l’adaptation.

Quand on veut on peut 

Et c’est justement le cas : Comble de fierté, le Maroc se trouve porteur des valeurs du monde d’après. Portés par un élan que l’on aurait tort de croire anecdotique, le masque objet de ressentiments sous d’autres cieux devient notre étendard et se produit chez nous à plus de dix millions de pièces jour. Notre compatriote Moncef Slaoui chargé par Trump d’élaborer le vaccin anti covid est venu rejoindre le podium des héros mondiaux. Une éclosion d’inventions vient démentir la cohorte des nihilo sceptiques (bien connus au demeurant) qui en pleine crise sanitaire internationale n’ont pas hésité à touiller une affaire qu’il aurait fallu manier avec des pincettes.

Cela étant, le Maroc fort de ses qualités doit profiter des opportunités qui s’offrent à lui. Pour cela, Il porte en lui les gènes qu’il tire des lois de l’hérédité ; peut-être pas tous les ressorts mais il peut se donner les moyens de les acquérir. On peut dès lors affirmer sans risque de se tromper que lorsque le marocain veut : il peut. Les arguments en sa faveur se pressent en foule pour corroborer ce trait commun. 

A titre d’exemple : le lycée de Ben guérir appartenant à l’office chérifien des phosphates s’est donné la peine de créer un établissement d’excellence. Le résultat ne s’est pas fait attendre. Ce lycée envoie à polytechnique Paris plus d’étudiants que tous les autres établissements du Maroc réunis.

Sans devoir m’attarder sur d’autres exemples tout aussi saillants, le Maroc dispose aujourd’hui peut-être plus qu’hier de ce « Grand narrative » c’est-à-dire cette histoire commune valorisante dans laquelle tout le monde se reconnait et en sort grandi car elle lui apporte une satisfaction de lui-même à travers un sentiment de fierté collective.

 On pourrait même « pousser le bouchon » et penser que grâce à ce sentiment unanimement partagé le Maroc aurait pu illustrer rétrospectivement le fameux ouvrage « la richesse des nations » d’Adam Smith. 

Rien ne nous empêche d’affirmer avec fierté qu’une autoroute de possibilités s’ouvre à nous. Notre emplacement géostratégique a quelques encablures d’Europe, notre gouvernance, notre stabilité politique sont autant d’atouts pour attirer au Maroc des relocalisations de multinationales installées en chine. On peut dès lors avancer que : Hormis quelques activités toutes ne vont pas se relocaliser en Europe car on ne s’émancipe pas facilement de dogmes qui ont façonnés les esprits surtout lorsque les lobbys financiers demeurent tapis dans l’ombre. Nul doute. Les actionnaires des fonds d’investissement et des multinationales ont oubliés d’être niais. Ils sont certes nationalistes, je veux bien, mais sans être philanthrope.

Ces lignes ci-dessus si elles ont peut-être l’ambition de décrire des émotions collectivement partagées, essaient plus de trouver des ressemblances avec des succès stories qui ont toutes eu pour catalyseur un sentiment de fierté nationale. Nous allons enfin échapper à ce pessimisme dans lequel les lamentations sont plus fortes que les douleurs. 

Le Maroc des nouvelles règles 

A moins de rejoindre cette cohorte de gens qui pratique l’« ultracrepidarianisme » terme solennel et pompeux qui décrit les gens qui ont tendance à parler avec assurance de sujets sur lesquels ils n’ont pas de compétences crédibles ou démontrées, je préfère m’entourer d’un minimum d’humilité et suggérer ce qui suit.

 Dans le but de s’adapter au nouvel environnement, le pays devra soutenir sa demande par de l’endettement interne mais surtout il devra avoir et/ou créer un large tissu industriel de produits exportables qui lui permettront d’acquérir une capacité de remboursement en devises génératrice d’un niveau de fiscalité en adéquation avec son taux de croissance. De toutes les façons, l’argent public devra servir de « gilet pare-balles » dans une économie dans laquelle l’Etat est le principal investisseur. Ainsi déclinée la cause semble juste, il faudra pour cela, à l’instar de tous les autres pays, s’endetter massivement pour maintenir son tissu industriel mais surtout s’adapter aux nouvelles opportunités qui s’offrent par l’acquisition de nouvelles capacités industrielles. 

Bien évidemment, Il ne faudra pas tirer ses principes de ses préjugés mais de la réalité des choses. Toutefois, si la directrice générale du FMI a déclaré que la dette mondiale représentait en fin d’année 2019 plus de 230% du produit intérieur brut mondial, vu les déclarations des autres pays, ce chiffre sera sans doute porté a plus de 300% avant la fin de l’année.

Dans cet état de fait les 150% du P.I.B auxquels pourrait prétendre le Maroc n’ont rien de saugrenu des lors que la majeure partie de l’endettement génère de nouveaux moyens de production et non pas de la simple consommation.

Cependant, sans prétendre se comparer aux autres économies de la planète, la philosophie liée à l’endettement s’applique néanmoins à tous. Autant dire que le développement a ses règles suprêmes et la finance sera obligée de s’y conformer. Plus que le niveau de l’endettement lui-même c’est la capacité de remboursement qui doit primer sur la décision d’investissement. Et en termes de décision, Fort heureusement, on n’a plus rien à prouver. En effet, personne ne viendra contester la pertinence de tels choix, à fortiori lorsque nous sommes conduits à admettre qu’entre autres mérites, le souverain suivi de la « task force » qui gravite autour de lui a déjà réalisé des prouesses qui dépassent de loin le niveau des richesses naturelles du pays.