chroniques
L’étrange létalité du coronavirus
Chaque année, selon l’OMS, les accidents de la route, dans le monde, laissent sur le carreau 1,35 millions de morts et entre 20 et 50 millions de blessés. Il y a, sur les routes un mort toutes les 21 secondes. C’est proprement effrayant. Après deux mois de confinement, le taux de létalité du Covid-19 atteint péniblement 279.000* décès, moins de 0,004% de la population mondiale.
Avec plus de 77000 morts, les Etats-Unis paient à la pandémie un lourd tribut. Les USA sont paradoxalement suivis par le Brésil, premier pays d’Amérique latine aussi bien en nombre de décès qu’en cas de contaminations. C’est l’addition à payer, en partie du moins, par les choix politiques de Donald Trump et de Jaïr Bolsonaro qui, avec une communication erratique, ont été des parangons de la forfanterie et de l’atermoiement.
En Europe, la pandémie a fait 150 000 morts. C’est la Grande-Bretagne, avec Boris Johnson et ses malencontreuses hésitations, qui est désormais en tête avec 31 000 morts, devançant ainsi et respectivement l’Italie, l’Espagne et la France, trois pays qui furent, dès le début de la crise épidémique, le premier trio sur le podium mortuaire. L’Allemagne, le Danemark ainsi que l’Autriche s’en sortent bien mieux. Ces trois pays sont déjà rentrés dans un lent déconfinement qui semble se présenter, pour l’instant, sous de bons augures.
Dans toute l’Asie, avec la Chine et l’Iran en tête, la pandémie n’a fait que 17 549 décès. En plus d’être la partie de la planète où les démographies sont galopantes avec : l’Inde, 1 milliard 359 millions d’âmes, 271 millions en l’Indonésie, 220 millions au Pakistan, 165 millions au Bangladesh… c’est aussi le continent qui compte 70% des pauvres du monde, notamment en Asie du sud. Au Népal, il y a zéro mort et le Sri Lanka n’en compte, à ce jour, que trois. Désarmant, ce constat qui confine à l’incrédulité reste un défi pour la raison.
L’OMS pense toujours que l’Afrique doit s’attendre, dans un avenir proche, à près de 190 000 décès. Pour autant, des scénarios bien plus catastrophiques furent envisagés, depuis le début de la pandémie. Il reste que le continent africain, avec 17% de la population mondiale et les 20 pays les plus pauvre du monde, contrarie toutes les prévisions et demeure une exception, avec ses 2073 morts. Toute l’Afrique dénombre moins de la moitié du Canada qui déplore 4693 morts alors que ce pays ne dépasse pas 37 millions d’habitants. A peine plus que le Maroc.
Reste le cas de la Suède. En prenant le contrepied de tous et en ne confinant que la partie vulnérable de sa population, le gouvernement suédois a été le moins coercitif de tous les pays du monde. Toutefois, le pari fait sur la confiance, la responsabilité et l’autolimitation individuelle n’a pas empêché le pays de déplorer 3220 morts, trois fois plus que les 1010 morts que comptent le Danemark, la Norvège et la Finlande réunis.
Sans crier victoire, les cas de l’Asie et de l’Afrique font preuve, et contre toute attente, d’une impressionnante résilience. Et si on devait choisir la mortalité, comme seul critère, on reste dubitatif devant cette curieuse évidence. Le Covid-19, et c’est le paradoxe, semble frapper plus durement des sociétés fortement prudentielles et assurancielles que les sociétés habituées à vivre, avec fatalité, les calamités qui leurs tombent dessus.
*Tous les chiffres du covid-19 datent du 9 mai
Bab Magazine