Trump ou Biden : Maroc - Etats Unis, constantes et variables…

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Avec Trump à la Maison Blanche depuis quatre ans, l’on a eu un mandat qui a permis d’appréhender le niveau et la dimension des relations entre Washington et Rabat. Qu’en sera-t-il de Joe Biden, démocrate, l’emporte ?

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Comme la planète entière, le rendez-vous de l’élection présidentielle américaine est une échéance de premier plan pour la vie politique américaine mais aussi pour la communauté internationale. Durant les quatre prochaines années (2021-2024(, l’empreinte sera forte. Donald Trump réélu ? Tout le monde a une idée de sa gouvernance. De son unilatéralisme. Et de tout le reste- le périmètre a été en effet largement balisé au cours de son premier mandat.

Mais qu’en sera-t-il si le candidat démocrate Joe Biden l’emportait ? A un premier niveau d’analyse, pour ce qui est du Maroc, l’on peut penser que globalement la continuité prévaudra. 

Avec Trump, à la Maison Blanche depuis quatre ans, l’on a eu un mandat qui a permis d’appréhender le niveau et la dimension des relations entre Washington et Rabat ; il faut même dire que leur qualité s’est sensiblement renforcée à la différence de son prédécesseur, le démocrate Barack Obama… Qu’en sera-t-il avec l’élection de Joe Biden, démocrate ? Il devra bien prendre en compte la nature des liens entre les deux pays et les multiples composantes du partenariat privilégié, stratégique même, entre les deux pays. C’est qu’en effet le Royaume coche pratiquement beaucoup de cases. Il y a là un acquis. Un matelas d’intérêts mutuels important. Un socle.

Pour autant, le Maroc n’est pas aligné sur Washington : il a des intérêts nationaux propres et une pleine souveraineté sur sa diplomatie notamment pour ce qui est de la question palestinienne et du statut d’Al Qods Acharif, SM Mohammed VI étant par ailleurs, président du Comité Al Qods. Nul doute que sur cet aspect-là et sur d’autres, il pourrait y avoir des " frottements," des ajustements, voire même des points de divergence pouvant polariser un certain – ou autre ? – climat bilatéral. Qu’en sera-t-il, en particulier, du dossier de la question nationale du Sahara. Elle a bénéficié au Conseil de sécurité d’un ferme et constant soutien de l’administration Trump.  On vient encore de le voir le vendredi 30 octobre avec le vote d’une nouvelle résolution de cette haute instance onusienne -une victoire diplomatique du Maroc. Avec l’administration Obama, l’on se souvient que bien des ambiguïtés avaient été enregistrées notamment au sein de ce même Conseil. Il ne faut pas exclure à cet égard le regain d’activisme de certains cercles et réseaux ; ils voudront pratiquement reprendre du service pour soutenir les séparatistes – Mary Kerry Kennedy, nièce de Robert Kennedy et présidente du centre éponyme, ne sera pas la dernière sans doute à se remobiliser.

Reste que sur la table, Biden élu trouvera une coopération féconde, multiforme aussi. L’accord du Millenium Challenge Coopération Compact avec une enveloppe de 450 millions de dollars signé en 2017 ; l’impact de l’Accord de libre-échange signé en 2006 ; la forte hausse des échanges commerciaux d’un montant de 51 milliard de DH en 2019, soit un triplement en quatre ans ; les Etats-Unis au 7ème rang des investisseurs ; et quelque 160 entreprises américaines installées au Maroc, c’est autant de secteurs d’une coopération dense.

A côté de ce premier volet, un autre : celui de la nature, de la dimension et de l’étroitesse des rapports diplomatiques entre les deux pays. Le Maroc est un allié majeur non membre de l’OTAN – comme la Jordanie et l’Egypte. La coopération militaire est optimale avec des dons de matériel, des achats d’avions F-16 et autres, des programmes de formation, des manœuvres conjointes dans la région, etc… En termes géostratégiques, Washington apprécie hautement le rôle du Maroc dans la région, au Maghreb et surtout dans l’espace sahélo-saharien. Sans oublier la diplomatie marocaine, dans le continent, pour la paix, la stabilité, la sécurité, le développement, etc… Par ailleurs, deux autres facteurs pèsent et solidifient les rapports bilatéraux. Le premier concerne le rôle particulier du Maroc dans la lutte antiterroriste qui participe de préoccupations politiques internes mais qui en même temps s’insère dans la constante de la diplomatie américaine de manière structurelle, depuis les attentats du 11 Septembre 2011. Il s’agit là d’un actif précieux, apprécié par Washington. Quant au second, il intéresse, lui, ce que l’on pourrait appeler le "Made in Morocco". Une politique citée en exemple et relative à la coexistence religieuse et au dialogue interreligieux. Rabat prône et défend un islam modéré, tolérant – une vision alternative à un certain islam politique et à ses dérives extrémistes et radicales.

Au total, une capitalisation qui ne pourra que peser de tout son poids durant le prochain mandat présidentiel américain, celui de Trump ou celui du démocrate Biden…

L’administration américaine de Trump –s’il est réélu- peut-elle méconnaître les intérêts supérieurs du Maroc, l’autonomie de sa diplomatie, l’état d’esprit du peuple marocain ? Le démocrate Biden à la Maison Blanche peut-il mettre en équation toutes ces données ? Difficile à croire. Il aura aussi à prendre l’habit présidentiel et à assumer sa charge sur la base des intérêts supérieurs bien compris de son pays.

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