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Chine : Covid-19, l’épine qui pourrait faire vaciller l’économie - Par Abdelghani AOUIFIA

Outre la résurgence des infections au Covid-19, les incertitudes géopolitiques liées notamment au conflit en Ukraine et la hausse continue des cours des matières premières sont venues s’ajouter aux défis que la Chine doit relever
Par Abdelghani AOUIFIA (Correspondant permanent de la MAP à Pékin)
Beijing - L’actuelle envolée des infections au Covid-19 enregistrée dans certains des principaux hubs économiques de la Chine a exacerbé les pressions sur l’économie du pays au milieu d’appels à une intervention plus musclée pour soutenir une croissance mise à mal.
La hausse des infections, la plus grave dans le pays depuis deux ans, a braqué les projecteurs sur l’économie chinoise, les experts s’interrogeant si le pays réussirait à maintenir l’élan pris depuis 2021, quand la Chine a enregistré le taux spectaculaire de 8,1 de croissance dans un contexte de ralentissement mondial.
Lors de la récente session de l’organe législatif suprême du pays, le gouvernement central s’est fixé comme objectif de réaliser une croissance de 5 pc pour 2022. Cependant, la performance de cette deuxième puissance économique mondiale au premier trimestre pourrait rendre difficile la concrétisation de cet objectif.
Outre la résurgence des infections au Covid-19, les incertitudes géopolitiques liées notamment au conflit en Ukraine et la hausse continue des cours des matières premières sont venues s’ajouter aux défis que la Chine doit relever pour maintenir son économie sur la trajectoire voulue par les autorités.
« La situation économique est compliquée », observe Kang Yong, économiste au cabinet KPMG-Chine, qui prévoit une croissance de 4,5 pc du PIB chinois durant le premier trimestre.
Certains analystes estiment qu’il serait difficile de réaliser un tel taux au regard du ralentissement que connaissent d’autres secteurs sous l’impact de la propagation du variant Omicron dans le pays.
Ainsi, le secteur des ventes en détail par exemple devra croitre de 1 pc au mois de mars contre une performance de 6,7 pc au cours des deux premiers mois de l’année.
La résurgence des infections devrait aggraver les difficultés pour les exportations chinoises déjà pénalisées par la hausse des prix des matières premières, indique Huo Jianguo, vice-président de la China Society pour les études sur l’Organisation mondiale du commerce.
Face à la hausse des infections, les autorités ont décrété des confinements dans les principaux hubs économiques du pays comme Shenzhen, troisième ville chinoise en termes de PIB, et Shanghai, centre économique et un des principaux ports à centenaires de la planète.
Ces villes abritent plusieurs géants qui jouent un rôle central non seulement pour l’économie du pays mais également pour la stabilité de la chaine d’approvisionnement mondiale.
Les autorités chinoises se veulent rassurantes. Elles soulignent que les mesures drastiques mises en œuvre pour freiner la propagation du virus donneront leur effet, notamment pour minimiser l’impact économique de la nouvelle flambée.
Jeudi, la Commission nationale de la santé a annoncé que la Chine a recensé, mercredi, 23.068 nouvelles infections dont 21.784 contaminations asymptomatiques. Sur ce total, 19.982 cas ont été signalés à Shanghai.
Les analystes attendent les chiffres que la Chine publiera prochainement sur la performance de son économie durant le premier trimestre de l’année. « Ces chiffres mériteront d’être traités avec attention », indique Wang Qian, économiste au cabinet Vanguard’s Asia Pacific.
Ils donneront une idée sur la façon dont les décideurs comptent ajuster les politiques monétaires et les autres mesures économiques pour absorber les chocs liés à la pandémie et aux autres défis géopolitiques, explique-t-il.
Le gouvernement central a répondu à la situation en soulignant, par la voix du Premier ministre Li Keqiang, que le pays aura recours aux instruments de politique monétaire le moment voulu pour soutenir efficacement l’économie.
Présidant la conférence exécutive du Conseil des Affaires d'État, Li a présenté certaines mesures prises pour aider les entreprises à faire face aux difficultés dont le report du paiement de l'assurance retraite par les entreprises des secteurs soumis à de fortes pressions.
Le Conseil des Affaires d’État, l’autorité administrative principale de la république populaire de Chine, a saisi l’occasion pour rassurer la communauté économique, soulignant qu’en dépit de l’actuelle complexité et incertitude en Chine comme dans le monde, les indicateurs économiques du pays demeurent globalement raisonnables.
L’accent a été mis sur la nécessité de coordonner la lutte contre la pandémie et le développement économique du pays, en droite ligne de la stratégie anti-pandémique dite de « tolérance zéro » qui avait permis à la Chine de contrer la propagation du virus tout en protégeant l’économie.
Un train d’autres mesures ont été préconisées par le Conseil pour donner toutes les chances à une croissance dans la limite de l’objectif fixé par le gouvernement, y compris la mise en œuvre d’une politique monétaire flexible.
Cependant, les autorités chinoises plaident pour la prudence dans la gestion de l’économie en cette période ouverte sur tous les scénarios.