Financement des campagnes de l'ANC : Les déboires de Ramaphosa

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En dépit de sa reconnaissance audio de l’usage frauduleux que l’ANC fait de l’argent public, le rapport d’enquête a trouvé le moyen de blanchir Ramaphosa qui reste empêtré dans la fermegate en référence aux millions de dollars aux origines suspectes trouvés par des cambrioleurs dans sa ferme.

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Par Hamid AQERROUT  (Bureau de la MAP à Johannesburg)

Johannesburg - Le Président sud-africain, Cyril Ramaphosa, peut enfin pousser un soupir de soulagement après que le protecteur public par intérim Kholeka Gcaleka n'ait trouvé aucun acte répréhensible à son encontre concernant ses commentaires sur l'utilisation abusive de fonds au sein du Congrès National Africain (ANC au pouvoir), qui ont fait surface dans un enregistrement audio.

Dans son rapport d'enquête final qu'elle vient de publier, Mme Gcaleka a déclaré qu'il n'y avait aucune preuve que Ramaphosa "ait enfreint les dispositions du Code d'éthique", ajoutant que les allégations contre le Président «n'étaient pas fondées».[ Malgré la reconnaissance audio de l’exploitation de l’argent public dans la campagne électorale - NDLR].

Selon ces allégations, Ramaphosa aurait violé le code en omettant d'informer et de fournir des preuves à toutes les autorités compétentes concernant l'utilisation abusive présumée des fonds de l'État pour les activités du parti au pouvoir à des fins politiques. Mais le Protecteur du citoyen n’est pas de cet avis. Elle a expliqué que les preuves obtenues jusqu’ici révèlent qu'avant que le Président ne fasse ces déclarations, les faits ont été largement rapportés même par la Commission judiciaire d’enquête sur la capture de l’Etat.

Dans un enregistrement audio, qui a été largement diffusé sur les réseaux sociaux et a suscité une controverse politique et un débat public houleux, Ramaphosa affirme être au courant de deniers publics prétendument pillés et utilisés pour les campagnes politiques de l’ANC en 2017, année au cours de laquelle il a accédé à la présidence du parti au pouvoir et, par la suite, à la Magistrature suprême du pays. Il reconnait aussi avoir décidé de garder le silence pour protéger l'image du parti.

Ces remarques ont été faites dans un enregistrement d'une réunion du Comité exécutif national (NEC) de l'ANC, qui a été divulgué par la suite. Dans l'audio, on peut entendre le Président sud-africain dire : «Ils savent que dans certains cas, l'argent de l'État a été utilisé dans certaines campagnes de l’ANC, mais ils n'en parleront pas». «Chacun de nous sait qu'une bonne partie de l'argent utilisé dans les campagnes du parti, pour transporter les gens et faire toutes sortes de choses provient des ressources publiques de l'État», a-t-il reconnu.

Reste à justifier les millions de dollars de la fermegate

Suite à ces déclarations, l’ancienne protectrice publique Busisiwe Mkhwebane avait lancé une enquête sur Cyril Ramaphosa pour avoir prétendument enfreint le Code de déontologie exécutif. Mais elle a été suspendue par le Président par la suite. La protectrice publique par intérim Gcaleka pense le contraire et affirme que dans ces circonstances, les déclarations du Président rapportées dans l'audio ne violent pas le Code de déontologie et qu’en conséquence, «l'enquête est close".

L'enquête a été lancée après que Mervyn Dirks, député de l'ANC, a écrit au Comité permanent des comptes publics (Scopa) lui demandant de convoquer le Président pour rendre compte de ses remarques faites dans l'enregistrement audio divulgué. Suite à cela, le député Dirks a été suspendu par son parti pour avoir tenté d'ouvrir une enquête sur Ramaphosa concernant le pillage de l'argent de l'État pour les campagnes politiques de l’ANC en 2017.

Mais dans un nouveau développement de cette affaire, le président de la Scopa, Mkhuleko Hlengwa, a convoqué une séance spéciale pour permettre à Dirks de présenter et de motiver sa demande. Suite aux délibérations sur cette question, le Comité a d’abord décidé de demander à Ramaphosa d'expliquer ses propos, avant de se raviser par la suite. En effet, des membres du parti au pouvoir et une majorité de membres du Comité permanent des comptes publics ont empêché le Comité de convoquer le Président pour témoigner oralement sur ses propos à la suite d'un vote à la majorité.

Le Président sud-africain a peut-être échappé, cette fois-ci, à des démêlés de justice concernant ses déclarations sur l'utilisation abusive de deniers publics par le parti au pouvoir, l’ANC, à la destinée duquel il préside d’ailleurs, mais il demeure toujours hanté par l’affaire "farmgate" qui risque sérieusement de ternir son image à la veille du Congrès national du parti, prévu en décembre prochain.

Dans cette affaire, connue sous l’appellation fergate, Cyril Ramaphosa est accusé par l'ancien chef du renseignement sud-africain Arthur Fraser d’avoir dissimulé le vol de millions de dollars en espèce dans sa ferme Phla Phala à la police et l'argent au fisc, d'avoir organisé l'enlèvement et l'interrogatoire des voleurs, puis de les avoir soudoyés pour qu'ils gardent le silence.