Présidentielle Argentine : une pléthore de candidats, le ministre de l'économie en vedette – Par Rachid MAMOUNI

5437685854_d630fceaff_b-

Le ministre de l’économie, Sergio Massa, est apparu comme le seul capable d’éviter une déroute face à l’opposition du centre-droit

1
Partager :

Rachid MAMOUNI -  (Directeur à Buenos Aires du Pôle Amérique du Sud de la MAP)

Buenos Aires - Les électeurs argentins se souviendront pour longtemps de cette nuit du 24 au 25 juin. Le suspens aura duré jusqu’à la dernière minute avant de voir dévoilé définitivement un candidat unique de la majorité sortante en la personne du ministre de l’économie, Sergio Massa, pour succéder au président Alberto Fernandez.

Peu de temps avant la fin du délai légal pour la présentation des candidatures aux élections « primaires, ouvertes, obligatoires et simultanées » prévues par la loi électorale en Argentine, le nom de Sergio Massa est apparu comme le seul capable d’éviter une déroute face à l’opposition du centre-droit qui attend, en embuscade, pour revenir au pouvoir.

Dans la foulée, la discipline quasi-martiale des mouvements de la galaxie peroniste a opéré. Tous les autres pré-candidats annoncés auparavant se sont alignés sur la décision prise par la hiérarchie de la nouvelle coalition « Union pour la Patrie » et au sommet de laquelle trône l’ancienne présidente pour deux mandats (2007-2015) Cristina Kirchner.

Les victimes collatérales de cette surprise aux allures d’une tragédie grecque ne sont autres que le ministre sortant de l’Intérieur, Eduardo de Pedro, qui avait diffusé quelques heures auparavant un clip de lancement de sa candidature avec un colistier célèbre, l’ancien chef du cabinet des ministre, Juan Mansour.

La deuxième victime collatérale de la candidature de Massa, qui a eu l’effet d’une « bombe », est l’ambassadeur d’Argentine au Brésil et ancien candidat malheureux en 2015, Daniel Scioli.

Pour amortir le choc de cette annonce et préserver les susceptibilités des uns et des autres, la coalition dirigée par Cristina Kirchner a tenu à rendre hommage aux deux candidats écartés pour avoir « privilégié l’unité du péronisme et favorisé l’intérêt général face à l’intérêt personnel ».

Avec cette manoeuvre de haut vol dont seule Cristina Kirchner semble avoir le secret, Massa fait figure de grand favori pour passer le cap des primaires et s’engager dans la grande bataille des élections présidentielles contre les candidats de l’opposition.

Seule ombre au tableau, sa gestion en demi-teinte à la tête du ministère de l’économie qui, malgré des efforts colossaux déployés au cours des dix derniers mois, n’a pas réussi à contenir la hausse des prix, ni la détérioration de la monnaie nationale et encore moins à satisfaire les réclamations des millions de bénéficiaires des aides de l’Etat.

Avec le candidat Massa, l’objectif de la majorité sortante est clairement affiché : passer le cap du premier tour et remporter le ballotage au deuxième tour face au candidat de l’opposition.

Celle-ci part en rangs dispersés pour choisir un des deux candidats en lice : l’ancienne ministre de la sécurité et présidente du Parti Proposition républicaine (PRO), Patricia Bullrich, et le maire sortant de Buenos Aires, Horacio Larreta.

La mission de l’opposition semble être plus simple : épingler les ratés et les couacs du gouvernement sortant aux plans économique et social, profiter de la fronde des Argentins et descendre en flamme la cacophonie qui a marqué le gouvernement sortant avec un président et une vice-présidente qui ne se parlent pas.

A cela s’ajoutent le problème de l’endettement avec le Fonds monétaire international, les conséquences d’une sécheresse inédite et les griefs des exportateurs agricoles contre le gouvernement à cause des prélèvements jugés exorbitants sur leurs recettes.

Le 13 août prochain, pour la première fois de l’histoire, les électeurs argentins trouveront sur les bulletins de vote un candidat qui flirte avec les idées de l’extrême droite et que certains n’hésitent pas à comparer à l’ancien président brésilien, Jair Bolsonaro.

Javier Milei se présente au nom du parti libéral « Libertad Avanza ». Ses idées et ses discours enflammés lui ont déjà permis de conquérir un siège de député et attirer la sympathie d’une jeunesse urbaine désabusée et blasée par la classe politique classique, une jeunesse qui aura vu ses ambitions émoussées par la crise économique et ses horizons bouchés à cause d’un manque de vision à long terme.

Dépourvu d’une structure partisane qui soit forte et omniprésente, notamment dans les vastes zones rurales de l’intérieur du pays, Milei ne cesse de pointer « la caste politique » comme seule responsable de l’état du pays et assume volontiers le statut d’outsider qui pourrait créer la surprise en octobre prochain.

Outre ces quatre grands favoris aux primaires du 13 août prochain, 15 autres candidats de différents bords politiques seront en lice pour les primaires.

A l’extrême gauche de l’échiquier politique, il y a le syndicaliste Juan Grabois, la leader du « Front de la Gauche », Myriam Bergman, Manuela Castaneira, présidente du Nouveau mouvement vers le socialisme.

Dans la même mouvance, Escobar Jesus se présente au nom du mouvement « Libres du sud » qui s’identifie à un nationalisme de gauche et se fait porte-voix des paysans et des indigènes.

Dans la constellation de la gauche et du centre-gauche, figurent d’autres candidats comme l’ancien secrétaire d’Etat Guillermo Moreno, ou le syndicaliste Raul Castells.

Le flanc droit et centre-droit de la classe politique est représenté notamment par Nazareno Etchepare, leader du parti Demos, qui affronte dans ces primaires l’écrivain et universitaire Julio Barbaro, Ou encore Juan Schiaretti, gouverneur sortant de la province prospère de Cordoba.

Le coup d'envoi d’un long marathon de campagne électorale a été donné ce dimanche. Il sera marqué par deux débats présidentiels à la télévision, suivi d’un troisième en cas d’un deuxième tour du scrutin.

Les candidats qui auront passé le cap des primaires devront s’affronter le 22 octobre à l’occasion du premier tour des élections générales, qui verront également l’élection de la moitié des membres de la Chambre des députés et un tiers du Sénat.

Un deuxième tour serait prévu le 19 novembre et le nouveau président sera investi le 10 décembre prochain pour gouvernera jusqu’en 2027.