société
C’était il y a quinze ans et que d’eau sous les ponts
30 juillet 1999, le dauphin de Hassan II acc?de au tr?ne. D?cembre 2010, la Tunisie s?embrase ? partir de l?immolation d?un jeune marchand ambulant. Le ??printemps arabe?? est lanc?. Il emporte la Libye, contamine l?Egypte, infecte la Syrie et se propage dans d?autres pays arabes. Deux mois plus tard il arrive au Maroc sous le nom de 20 f?vrier. 1juillet 2011, le Maroc adopte une nouvelle constitution. C?est le deuxi?me av?nement de Mohammed VI
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Au moment o? j??cris, 23 juillet, ?a fait quinze ans jour pour jour. Subitement la radio et la t?l?vision nationales interrompent leurs ?missions pour ne plus diffuser que la lecture de versets coraniques. Le doute c?de la place ? la certitude. La confirmation officielle ne viendra qu?? vingt heurs par le discours de celui qui allait dans quelques heures devenir le 21?me roi de la dynastie alaouite sous le nom de Mohammed VI.
C?est un instant de ceux dont on se rappelle o? on ?tait et ce qu?on faisait.
Les Marocains ?taient pris dans le tourbillon de la stup?faction, du doute et de l?incertitude. A 22h 30, la t?l?vision transmet la c?r?monie de la bay?a. Mohammed VI, le visage ferm?, drap? dans la dignit? de son nouveau m?tier, assiste ? la signature de l?acte d?all?geance. C?est l?av?nement d?un nouveau r?gne officialis? le 30 juillet.
Le roi est mort, vive le roi?!
Que d?eau sous les ponts.
Le legs est lourd mais rapidement le nouveau monarque imprime son tempo aux chantiers des r?formes. Comme gris?s par les horizons qui s?ouvrent, on allait vivre au rythme d?un souverain voyageur.
Les cinq premi?res ann?es du r?gne, perturb?s par les attentas du 16 mai 2003 et parasit?s par une subversion, il faut le dire soft, de quelques ??militants?? de la vingt-cinqui?me heure, sont v?cues comme sur un tapis volant port? par la mise en place du nouveau concept de l?autorit?, nom de guerre de la d?basrisation de l?administration territoriale, le lancement des grands chantiers structurants et d?une politique de r?conciliation des Marocains avec eux-m?mes et avec leur pass?.
Le remplacement, le 9 novembre 1999 de Driss Basri par Ahmed Midaoui, ministre, et Fouad Ali El Himma, ministre d?l?gu?, permet ? Mohammed VI de faire tomber un symbole et de marquer la pl?nitude de ses pouvoirs
Et pendant que les Marocains apprenaient qu?avec les longs p?riples du roi ? travers le royaume, ils assistaient ? la naissance d?un mode de gouvernement, peu de dissertation et beaucoup de corps ? corps avec les gens et leurs probl?mes, deux grands affluents soutiennent le changement?:
?Le code de la famille est le premier choc des cultures que rencontre Mohammed VI sur sa route. Les d?buts des ann?es deux-mille sont marqu?s par un affrontement qui prend les allures d?une "guerre civile" entre pro et anti plan d'int?gration de la femme dans le d?veloppement. Si quelqu?un pouvait encore douter de l?habilet? politique de Mohammed VI, la mani?re dont il d?samorce la crise au profit de la femme, ?difie sur ses intentions et sa mani?re de faire
L?Instance Equit? et R?conciliation pour solder les m?faits de ce qu?il est convenu d?appeler ??les ann?es de plomb??, viendra compl?ter cette autre fa?on de faire que va mettre en ?uvre par petites touches ce nouveau roi.
A partir de 2006, la r?forme du Maroc atteint une vitesse de croisi?re en vue de sa maturation, mais qui ne manque pas d?entrainer dans son sillage un certain ronronnement de temps en temps troubl? par la lute contre le terrorisme islamiste.
D?cembre 2010, la Tunisie s?embrase ? partir de l?immolation d?un jeune marchand ambulant. Le ??printemps arabe?? est lanc?. Il emporte la Libye, contamine l?Egypte, infecte la Syrie et se propage dans d?autres pays arabes. Deux mois plus tard il arrive au Maroc sous le nom du 20 f?vrier.
D?s le d?but, les vingt-fi?vristes se r?v?lent un mouvement ind?finissable o? se retrouvent toutes les aspirations et se regroupent moult frustrations. C?est un mouvement de jeunes joyeux et r?veurs comme tous les mouvements des jeunes. Ils r?aliseront sans doute un jour une partie de leurs r?ves et reviendront un autre, un peu plus tard, de beaucoup de leurs utopies. D?ici l? des professionnels de la politique, gauchistes et islamistes, s?y greffaient pour r?aliser par procuration leurs objectifs.
Mohammed VI est face ? sa premi?re crise majeure. De son QG il observe le mouvement et pendant pr?s de vingt jours il ne dit mot, laissant aux forces de l?ordre le cantonnement du mouvement sans violence excessive et sans recours aux armes ? feu si r?pandu ailleurs.
Des noms de personnalit?s publiques et priv?es, rendues ? elles seules le concentr? de tous les maux du Maroc, pass?s et ? venir, sont jet?s en p?ture. Le mim?tisme par lequel on reprenait ici les slogans des Tunisiens et des Egyptiens pour faire comme eux ou mieux qu?eux, t?moignait de la panne s?che de la cr?ativit? d?une jeunesse fra?che, vaillante, aspirante mais expos?e ? la manipulation qui r?duisait son ambition ? des onomatop?es politiques.
Sans craindre le ridicule, des hommes d?affaires, des intellectuels, des journalistes et des acteurs de la soci?t? civile, des partis ou une partie de ces partis, atteints par la f?brilit? ou pris de panique, red?couvrent les vertus de la jeunesse et lui jouent du violent sous son balcon.
Le 9 mars, le souverain sort de son silence pour annoncer une r?forme constitutionnelle. Deux mois plus tard, pr?s de trois millions de spectateurs vibrent ? Mawazine, festival honni par les islamistes et les f?vrieristes, aux rythmes des musiques du monde ? Rabat. C?est bien plus que ce que les manifestations du 20 f?vrier ont pu r?unir en trois mois. Le premier juillet 2011, les Marocains adoptent la nouvelle constitution. Mohammed VI pouvait c?l?brer son deuxi?me av?nement.
Y a-t-il une exception marocaine?? La r?ponse est oui m?me si la question s?est impos?e d?elle-m?me d?s l?embrasement de la Tunisie suivie de l?Egypte. C??tait une fa?on de s?interroger sur la possibilit? du Maroc de se soustraire ? la d?ferlante qui semblait entrainer le monde arabe dans une dynamique vertueuse, qui s?av?ra cercle infernal.