La chute de Jacques Bouthier, ''Serial Sex'', la Marocaine des Droits des Victimes au front - Par Mustapha SEHIMI

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Me Aicha Guelaâ, présidente L'Association Marocaine des Droits des Victimes (AMDV) - Ne réseau Bouthier a surtout fonctionné à partir de Tanger et les victimes sont des Marocaines. Des témoignages ont été faits à cette occasion : les victimes ont parlée ; elles ont fait le procès d'un "système" qui fonctionnait depuis des lustre.s

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Depuis le 30 mai dernier, Jacques Bouthier a été mis en examen à Paris pour "traite des êtres humains" "et viol" sur mineur". Il a été placé en détention provisoire. Cinq personnes ont également été mises en cause et écrouées le 21 mai dernier.

 

Des accusatrices prennent la parole lors d'une conférence de presse organisée par l'Association marocaine pour les droits des victimes à Tanger, dans le nord du Maroc, le 17 juin 2022. (Photo de Fadel SENNA / AFP)

Tout a commencé, le 15 mars, avec une enquête préliminaire ouverte, suite à une déposition à la police d'une jeune femme marocaine de 22 ans. Elle raconte, donne durant des heures le détail de près de six années passées avec l'inculpé. Des relations tarifées qui avaient commencé alors qu'elle n'avait que 16 ans. Elle était sa " chose". Taillable et corvéable à l'envi si l'on ose dire. Contrainte d'assurer un" service " sexuel at home, pratiquement contrainte aussi, de l'accompagner à des soirées libertines à Noisy-le-Sec, Perreux-sur-Marne et ailleurs. Il lui demande un jour de dénicher une autre mineure. Ce sera une collégienne de 14 ans. Il l'installe alors dans le même appartement cossu dans un quartier chic. Les attouchements sur cette adolescente se multiplient, celle-ci refusant de lui offrir sa virginité... 

La perquisition opérée permet de saisir sur place des fichiers pédopornographiques. Pour le principe, il est considéré jusqu'à présent comme innocent. Mais les charges qui sont réunies depuis plus deux semaines sont lourdes. Accablantes. Gravissimes. Les chefs d'inculpation ont été depuis élargis à la qualification d'"association de malfaiteurs en vue de commettre le crime d'enlèvement et séquestration en bande organisée et détention d'images pornographiques".

Son profil ? Singulier à bien des titres. Agé de 76 ans, il est marié - sa femme a été entendue. Il a monté le Groupe ASSU 2000, leader dans le courtage auprès du particulier qui témoigne plus de quatre décennies de savoir-faire .Un créneau où il a été pionnier : dans la conception et la distribution d'assurances ainsi que de crédits immobiliers ; un pôle de courtage avec ASSU 20000 ; plus de 400 points de vente en France et des dizaines d'autres à l'étranger - dont Tanger. Une fortune de plus de 170 millions d'euros.

Une culture néocolonialiste

L'Association Marocaine des Droits des Victimes (AMDV) a pris ce dossier en charge. Sa présidente - l’avocate Me Aicha Guelaâ - et les membres de son bureau ont ainsi tenu vendredi 17 juin dans la capitale du Détroit une conférence de presse pour éclairer l'opinion publique sur cette "affaire". C'est que le réseau Bouthier a surtout fonctionné à partir de cette ville et que les victimes sont des Marocaines. Des témoignages ont été faits à cette occasion : les victimes sont parlées ; elles ont fait le procès d'un "système" qui fonctionnait depuis des lustres. Bouthier faisait pratiquement son "marché" sur place, parmi les jeunes employées de son entreprise locale. Des témoignages plein d'émotion décrivent dans le détail les techniques de ciblage et recrutement, les pressions. 

Le staff n’ignorait rien de toutes ces pratiques, mais préférait regarder ailleurs. Une sorte d'"omerta" prévalait comme si le droit de cuissage féodal se perpétuait aujourd'hui. Les jeunes femmes qui ne cédaient pas étaient licenciées. Nul doute que l'instruction va permettre d'établir certaines responsabilités du personnel encadrant de l'entreprise présentant sans doute bien des éléments de "complicité". Les deux victimes plaignantes - présentées sous les prénoms de Lilya et Rim, le visage caché - le 7 juin sur une chaîne française, ont mis en cause et démonté "tout le système Bouthier" avec des supérieurs hiérarchiques, hommes et femmes, qui faisaient les entremetteurs et qui doivent aussi être jugés". Une procédure pénale est envisagée à Tanger contre Bouthier devant la justice marocaine. 

A la tête de l'Association AMDV, Me Aicha Guelaâ, brise aujourd’hui le silence sur cette affaire. Le procès d'un homme aussi et d'autres : une sorte de délocalisation d'un "Serial Sex" ; celui aussi d'une certaine rémanence d'une culture néocolonialiste avec ses marqueurs - la domination conjuguée à la prédation...

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