Les colleuses - Par Naïm Kamal

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« On ne tue pas par amour » ! Que ce serait joliment dit si derrière il n’y avait pas un abject crime qui n’épargne aucun pays, même pas le Maroc

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"Même mon chien comprend quand je lui dis « non »", écrit une Colleuse. En douze mots, guillemets compris, tout est dit ! Si les Chiennes de garde en France étaient l’avant-garde du féminisme à la fin du siècle dernier, les Colleuses sont les crocs du combat féministe du troisième millénaire.

Elles ont pour spécialité de coller des affiches A4 partout où elles passent pour dénoncer les violences faites aux femmes. Elles ont été les guest-stars du tapis rouge cette semaine au Festival de Cannes habillées en veuves. Le temps de signer leur révolte contre les féminicides et violences consorts. La France compte 113 féminicides en 2021. Au Maroc on en était à 69 en 2017 contre 61 l’année suivante, selon la mission permanente du Maroc auprès de l’Office des Nations Unies à Genève. Rapportés au nombre de nos populations respectives, on fait presque match nul.

Robert et Larousse

Féminicides. En voilà un mot qui ne pose pas problème seulement aux Colleuses, mais également à mon ordi qui n’entend rien au féminisme. Chaque fois de rouge il le souligne au point de me pousser à consulter Le Robert et Larousse. Les deux sont d’accord et ne divergent que dans la formulation. Pour Le Robert c’est le ‘’meurtre d’une femme, d’une fille en raison de son sexe’’. Pour Larousse c’est le ‘’meurtre d’une femme ou d’une jeune fille en raison de son appartenance au sexe féminin’’. Le Robert précise : ‘’Le féminicide est un crime reconnu par plusieurs pays d’Amérique latine’’, m’obligeant à revenir au Larousse qui m’éclaire : ‘’Le féminicide n’est pas reconnu en tant que tel par le code pénal français.’’ Il lui préfère l’homicide, qu’il s’agisse d’hommes ou de femmes. Du coup je comprends mieux les réticences de mon ordi à l’accepter sans discuter. C’est un bonapartiste, nostalgique de Napoléon.

Le Bleu du Kaftan                                                  

"Même mon chien comprend quand je lui dis « non »". Dans l’oreille de certains hommes, et ils sont nombreux, ça résonne comme un OUI. On aura beau leur expliquer que NON c’est une voyelle et deux consonnes et OUI c’est trois voyelles, les voyous n’y entendent que dalle. Ou ne veulent pas comprendre, n’entendant que leurs pulsions.

A Cannes cette année, les critiques relèvent une présence assez significative du féminisme. L’AFP signale des prostituées massacrées en Iran dans "Les nuits de Mashhad" d'Ali Abbasi, une femme battue dans "Decision to leave" de Park Chan-wook, et un horrible féminicide dans "La nuit du 12" de Dominik Moll. Les Colleuses, elles, sont l’objet, pardon le sujet d’un documentaire. Le Maroc est aussi présent dans la catégorie Un certain regard par un film de Maryam Touzani, Le Bleu du Caftan, ‘’un long métrage poignant, selon sa fiche de présentation, qui parle de transmission, de tradition et d’amour, au sens le plus large du terme.’’

J’attendrai l’occasion de visionner le film produit par l’incontournable Nabyl Ayouch et coproduit par Amine Benjelloun pour voir ce que renferme ‘’l’amour, au sens le plus large du terme’’, et saisir ce qui nuance le bleu du caftan de la panoplie des autres bleus, l’indigo, le majorelle, le ciel, le marine, le nuit, le pétrole… Peut-être qu’il n’y en a aucune.

Le certain pour l’instant c’est que le titre est glamour, fleur bleue parfumé à l’eau de rose. Pour ce que le film a de poignant on verra plus tard. Avec le préjugé que le end ne peut être que happy. Si ça se confirme, ça nous changera du rouge sang.

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