Marrakech célèbre le Zellige dans sa pure authenticité marocaine et raconte son évolution

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Musée éphémère spécialement dédié au Zellige marocain, baptisé "Musée Expo Art du Zellige"

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Par Samir LOTFY (MAP)

Marrakech - Composante architecturale fondamentale et instrument décoratif des plus élégants et raffinés, comme visible, dans moult monuments et édifices emblématiques situés au coeur des villes impériales du Royaume, à l'instar de la ville de Marrakech, le Zellige marocain "handmade" demeure, sans nul conteste, une source de "fierté" et un patrimoine singulier transmis de génération en génération au Maroc, une Nation riche de plus de 12 siècles d'histoire rayonnante et séculaire.

Pour célébrer cette authenticité marocaine unique en son genre, la Cité des Sept Saints, à l'initiative de la Chambre Régionale de l'Artisanat Marrakech- Safi, dans un signe de reconnaissance à des générations de Maâlems-artisans qui ont bien voulu préserver cet art ancestral et le pérenniser, a aménagé au sein du Salon Régional de l'Artisanat, un Musée éphémère spécialement dédié au Zellige marocain, baptisé "Musée Expo Art du Zellige".

Une immersion complète et si rare au cœur d'un monde inventif où, rigueur géométrique, esprit inventif, finesse des motifs, beauté et magie des palettes de couleurs, et minutie du façonnage, font bon ménage pour nous livrer, in fine, ce joyau de l'art du bâtiment et de la décoration traditionnels au Maroc, le "Zellige".

Par définition, le Zellige marocain provient du mot arabe "Zalg" qui signifie "Lisse"; c'est une céramique polie destinée particulièrement à l'ornementation géométrique et dans certains cas, au décor épigraphique et floral.

Une nouvelle palette de couleurs

Cette forme d'art islamique qui trouve ses racines dans le langage universel des mathématiques bidimensionnelles, présente néanmoins, toutes les caractéristiques d'un moyen d'expression artistique.

La technique du zellige, une ancienne tradition de la poterie marocaine, consiste, quant à elle, à fabriquer des carreaux de céramique émaillée, découpés en pièces de formes géométriques bien définies, appelées : "Ferm" (pluriel de) "Ferma" qui signifie (petite pièce). Celles-ci sont, ensuite, associées pour former une composition ornementale plus au moins complexe afin de couvrir, les sols, les murs, les colonnes et quelque fois, même des plafonds.

Toutefois, si la technique de fabrication du Zellige n'a pas changé à travers les âges, la palette de couleurs a, quant à elle, évolué avec l'émergence, d'une ère à l'autre, de nouvelles couleurs.

C'est dire que durant des siècles de l'histoire du Royaume, et sous le règne des différentes dynasties succédées au Maroc, des artisans ont veillé, minutieusement, à perpétuer la tradition des motifs géométriques d'une beauté esthétique inégalable de l'art islamique, en s'outillant d'une règle et de compas pour se lancer dans la conception de "croquis" auxquels, avec finesse et précision, vont donner corps.

Cet ingéniosité de Maâlem marocain a eu pour effet de permettre au Zellige de vivre au rythme d'un développement fulgurant et de connaitre un rayonnement esthétique extraordinaire au Maroc grâce, à ses petites pièces colorées, d'abord conçues avec toute la précision et la minutie requises pour être montées, par la suite, en toute harmonie, homogénéité et soin, pour fournir, à la fin, "un tout" indivisible, d'une beauté et une magie si singulières.

Evoluer sans altérer

De par sa beauté esthétique et sa valeur patrimoniale, le Zellige marocain a eu donc, le grand mérite d'orner des dômes des mosquées et des palais, des faïences des mausolées, des murs de Medersas, ainsi que des fontaines entre autres, suscitant, au fil des siècles, admiration et nourrissant la curiosité des visiteurs. Au rang de ces décorations emblématiques figurent celles en couleurs blanche et bleue turquoise sur les minarets des mosquées de la Koutoubia et de la Kasbah à Marrakech, ou encore multicolores au palais Bahia.

Un art ancestral qui illustre le génie de l'artisan marocain, qui s'est donné corps et âme pour préserver ce savoir- faire, mieux l'adapter aux nouvelles tendances décoratives, sans altérer sa nature ou entacher son authenticité, tout en fournissant l'effort nécessaire pour relever les défis d'ordre technique, et consolider davantage les dimensions, les formes et les couleurs, permettant ainsi, au Zellige marocain de se distinguer par son façonnage "complexe" mais aussi par son évolution.

Toutefois, si le Zellige en tant que motif décoratif extérieur a fait son apparition au Maroc au 12è siècle, on s'accorde à dire que toute définition avec exactitude de la date précise de l'émergence de cet art et de son évolution selon des périodes historiques, demeure une entreprise délicate, en raison de l'absence de données historiques précises en la matière.

L'idée de ce Musée du Zellige marocain n'est pas un simple fruit de hasard mais, se veut la concrétisation dans les faits d'une profonde réflexion et d'une volonté manifeste de jeter la lumière sur une partie des plus importantes du patrimoine national qui incarne, en lui-même, tout un savoir- faire, une kyrielle de traditions et de pratiques anciennes, outre un esprit élevé de créativité de l'artisan marocain.

Le musée de la singularité du zélige marocain

Conférant au Salon Régional de l'Artisanat une forte dimension académique, ce Musée offre également l'opportunité de s’arrêter sur l’histoire et la singularité du Zellige marocain et des arts du bâtiment traditionnels.

Au micro de M24, la chaine télévisée de l'information en continu de la MAP, Khaif Allah Soufiane, responsable du Musée du Zellige, a loué l'importance de cet espace dédié à faire connaitre ce patrimoine séculaire du Royaume, notant que le Musée du Zellige marocain se décline en plusieurs Pavillons à savoir : "Pavillon Histoire" permettant un voyage du XIè au XXè siècles, le temps de découvrir l'importance de ce savoir- faire singulier chez les Almoravides, les Almohades, les Mérinides, les Sâadiens, et chez les Alaouites, avec un cadrage historique pertinent et un focus sur les monuments saillants, les architectures extérieure et intérieure, les motifs et les matières de l'époque (zellige, céramique, stuc, bois, pierre taillée, métal...) ou encore les caractéristiques de l’époque.

Le Musée compte aussi un "Pavillon Recherche Scientifique" où, est présentée une Etude comparative intitulée : " L’art géométrique marocain et l’art géométrique d’autres groupes culturels entre le 9è et 17è siècle", ou encore les familles de motifs construites par l’équipe de recherche à partir de Rosaces à 10 et 12 pétales obtenues par la méthode des Maâlems "L'Hasba" adoptées par l’Union Internationale de Cristallographie, a-t-il enchainé.

es visiteurs peuvent, en outre, se rendre aux Pavillons "Matières et arts" où, des explications exhaustives sont fournies sur les "Espaces pièces et formes", avec un focus sur la production, l'accrochage et la présentation de 89 pièces de Zellige (identifications et caractéristiques), ou encore sur les "Espaces couleurs et pigments", et les "Frem" (pièces), les formes et le lexique utilisés.

Dans ce Musée, on découvre, en outre, les "Espaces argiles", occasion de se faire une idée des fournitures, expositions et présentation des argiles roches et pâtes de Fès (Mless et Hrach), Safi (Sidi Abderrahmane et Yaghzar), Marrakech (Ourika et Tameslouht), Tétouan, et Caolin, ou encore les "Espaces outils" mettant en lumière les matériaux et outils de production et de façonnage de Zellige.

Sur place, le visiteur peut aussi suivre des films documentaires retraçant les différentes étapes de la production du Zellige, apprécier une série d'animations culturelles et artistiques, ou encore, de prendre part à des ateliers de construction des motifs par symétrie, "Rchim", "Tksar", "Lakhlas", "Lafragh" ou encore "Lfarch" (pose des pièces de Zellige).

 

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