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Pourparlers russo-ukrainiens d’Istanbul : fragile frémissement entre espoirs de cessez-le-feu et lignes rouges

Le Premier ministre britannique Keir Starmer et le président français Emmanuel Macron encadrant de près le président ukrainien Volodymyr Zelensky, au sommet de la Communauté politique européenne (CPE), à Tirana, le 16 mai 2025. (Photo / AFP)
Trois ans après la rupture du dialogue, Russes et Ukrainiens se sont retrouvés à Istanbul pour un premier round de pourparlers, aboutissant à un échange massif de prisonniers et une éventuelle rencontre Poutine-Zelensky. Mais les divergences, notamment sur les exigences territoriales russes, et l’entêtement ukrainien, poussé par les Européens, ont rapidement freiné les espoirs de percée diplomatique. Washington s’active, et la paix reste en suspens.
Istanbul - Réunis vendredi à Istanbul pour leurs premiers pourparlers de paix depuis plus de trois ans, Russes et Ukrainiens ont discuté d'un cessez-le-feu, d'une rencontre Zelensky-Poutine et conclu un échange de 1.000 prisonniers de chaque camp, ne faisant ainsi que peu de progrès vers une résolution complète du conflit.
Si le négociateur en chef russe Vladimir Medinski s'est dit "satisfait" et prêt "à poursuivre les contacts" avec l'Ukraine après ces pourparlers très attendus, la partie ukrainienne a, elle, accusé Moscou d'avoir formulé des demandes territoriales "inacceptables".
En l'absence des présidents Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine, les espoirs de progrès substantiels étaient minces.
Les deux délégations, menées par le ministre de la Défense côté ukrainien et par M. Medinski, un conseiller, côté russe, s'étaient retrouvées en début d'après-midi, entourées des médiateurs turcs.
Environ 1H40 plus tard, la rencontre au palais de Dolmabahçe était terminée et se soldait par trois annonces: la possibilité d'instaurer un cessez-le-feu, une éventuelle rencontre des présidents Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky et un échange de prisonniers.
"Dans les prochains jours, un échange massif de prisonniers, à raison de 1.000 contre 1.000, aura lieu", comme l'a dit Vladimir Medinski. Cette information a été confirmée par le chef de la délégation ukrainienne, Roustem Oumerov.
"Demandes inacceptables"
Côté ukrainien justement, une source diplomatique interrogée par l'AFP, a estimé que les négociateurs russes airaient "présenté des demandes inacceptables qui vont au-delà de ce qui a été discuté avant la réunion", dont le retrait des forces de Kiev de "vastes parties du territoire" ukrainien, avant l'instauration du cessez-le-feu.
Les deux délégations ont quitté le lieu de rencontre à Istanbul.
Plus tôt, le chef de l'administration présidentielle ukrainienne, Andriï Iermak, avait martelé qu'obtenir de la Russie un "cessez-le-feu inconditionnel" était la "priorité", ainsi que l'organisation d'une rencontre Zelensky-Poutine, ce qui serait une première depuis le début de la guerre.
Le négociateur russe, Vladimir Medinski, avait lui indiqué que Moscou voulait discuter des causes profondes du conflit et considérait ces pourparlers comme la suite de ceux, avortés en 2022 et aux cours desquels les Russes.
En déplacement en Albanie pour un sommet européen, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a appelé ses alliés à "une réaction forte" et des "sanctions" contre Moscou en cas d'échec des discussions.
Le chef de l'État français Emmanuel Macron a jugé "inacceptable" que la Russie n'ait pas répondu à l'appel de trêve, tandis que le chancelier Friedrich Merz s'est félicité de la tenue même des négociations, un "premier signal, tout petit mais positif".
Les dirigeants ukrainien, allemand, français, britannique et polonais ont ensuite échangé au téléphone avec le président américain Donald Trump, qui pousse pour un arrêt des combats.
Car dans cet intense ballet diplomatique, le locataire de la Maison Blanche avait assuré la veille être prêt à rencontrer M. Poutine "dès qu'il sera possible d'organiser" un sommet, sans quoi "rien ne se passera" concernant le règlement du conflit.
Une telle rencontre est "certainement nécessaire", a acquiescé vendredi le Kremlin.
"Pression"
Le weekend dernier, Vladimir Poutine avait surpris en proposant des négociations directes. Mais, appelé par Volodymyr Zelensky de se rendre à Istanbul pour négocier avec lui, le président russe, sans en rejeter le principe, n'a pas fait le déplacement, estimant les conditions pas encore réunies.
Les Européens et Kiev avaient réclamé un cessez-le-feu préalable avant toute discussion entre Kiev et Moscou. Une demande rejetée par M. Poutine, au motif qu'une trêve prolongée permettrait seulement à l'armée ukrainienne de se renforcer en recevant des armes occidentales, alors que les soldats russes ont l'avantage sur le front.
De son côté, Ankara a jugé "crucial" la mise en place d'un cessez-le-feu rapidement.
Les autorités à Bruxelles ont également fait bloc, la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas, ‘’déplorant’’ que la Russie "ne veu(ille) pas la paix", la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, promettant, elle, d'"accroître la pression" sur Moscou.
La Chine, proche partenaire de la Russie, a de son côté répété vouloir un accord de paix "juste" et "durable".