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Garzon, petit village d'Uruguay apparu sur la carte de l'art international
La cheffe cuisinier du Restaurante Garzón, Sol Aput López, cuisine pendant les préparatifs du CAMPO Artfest à Garzón, Maldonado, Uruguay, le 26 décembre 2024.. (Photo de Santiago MAZZAROVICH / AFP)
La chapelle de Pueblo Garzon, village de quelque 200 âmes niché au cœur de la campagne uruguayenne, se réveille sans ses traditionnels bancs en bois, remplacés par une installation sonore de l'artiste allemand Lukas Kühne faite de caisses et de marteaux en caoutchouc.
Rien d'anormal ici. Comme chaque décembre depuis 2017, Garzon sort de sa torpeur pour se métamorphoser le temps de Campo, un festival d'art créé par la photographe américaine Heidi Lender.
Pour sa 8e édition, fin 2024, Campo a réuni sur trois jours près de 20 artistes du monde entier, venus des Etats-Unis, de Singapour, de Corée du Sud ou encore du Brésil, attirant quelque 6.000 visiteurs.
Installé en Uruguay, Lukas Kühne s'est entiché du festival d'art de Garzon, "un projet utopique, dans le bon sens du terme".
"On dirait un village comme un autre, mais ça ne l'est pas, des choses très belles et intéressantes y naissent, il a sa propre aura", explique-t-il à propos de cette localité, située à 170 km à l'est de la capitale Montevideo dans une région parfois comparée à la Toscane en raison de son paysage de vignes et d'oliviers.
"Terre magique"
Le premier à avoir fait connaître le village a été le célèbre chef argentin Francis Mallmann, qui y a ouvert un restaurant il y a 20 ans.
Puis il y a 14 ans, la photographe Heidi Lender est à son tour tombée sous son charme, y achetant une maison et y fondant une organisation à but non lucratif avec l'ambition de "donner à d'autres artistes la possibilité de créer sur cette terre magique".
Aujourd'hui, son projet comprend des résidences d'artistes, le festival et bientôt la construction d'un campus pensé par l'architecte uruguayen Rafael Viñoly.
"C'est difficile d'expliquer ce que Garzon a de différent, il faut y venir" pour le comprendre, témoigne Mme Lender dans un entretien à l'AFP, citant pêle-mêle "une énergie qui n'existe nulle part ailleurs, un mélange de lumière, de gens, d'authenticité, de simplicité, de tranquillité, de solitude, de beauté".
Garzon bénéficie en outre d'une situation privilégiée, à distance -mais pas trop- de Punta del Este, la station balnéaire préférée de l'élite sud-américaine, appréciée autant pour ses plages que pour sa vie nocturne.
Près de la place principale où bat le coeur du village, avec sa chapelle, sa mairie, son ancien magasin transformé en boutique de design et le restaurant Mallman, l'artiste uruguayen Mauro Arbiza vient d'ouvrir sa propre galerie d'art, la cinquième de Garzon, après neuf ans passés à vendre des sculptures sur place.
Avec des prix allant de 2.500 à 40.000 dollars, ses œuvres s'adressent aux vacanciers fortunés qui profitent de l'été austral à Punta del Este pour faire un crochet par Garzon.
"Je me fais davantage de contacts dans le village qu'à Miami", affirme l'artiste, auteur d’œuvres monumentales installées en China et aux Etats-Unis. Autrefois habitué de la réputée foire de l'art de Bâle, M. Arbiza n'y va plus.
Charme suranné
Les autres galeristes témoignent aussi de l'intérêt croissant des touristes, collectionneurs et conservateurs, principalement européens et américains, mais aussi argentins et brésiliens.
Des visiteurs séduits par l'atmosphère surannée du village. Jusque dans les années 50, Garzon vivait de la prospérité d'un moulin à blé et revendiquait quelque 2.000 habitants, contre 178 selon le dernier recensement.
Artigas Rodriguez, 85 ans, habite le village depuis plus de vingt ans. "C'est calme" et "les gens s'entendent bien", assure-t-il depuis son humble maison, entouré d'objets qu'il collectionne et revend.
Parmi ses voisins figurent quelques noms illustres comme le tailleur des Rolling Stones, John Pearse, ou l'artiste française Marie Ducaté, qui y a un musée à son nom.