chroniques
Maroc-Algérie : Une offre détaillée
Que ce soit aux USA ou en Europe, la vision d’un grand marché maghrébin s’impose depuis des années, dès qu’on parle d’Afrique du Nord
Le discours du Roi Mohammed VI à l’occasion de l’anniversaire de la Marche Verte a une tonalité très particulière cette année. En effet, d’habitude le Souverain relate les développements de l’affaire dite du Sahara. Cette fois, alors qu’il y a des avancées diplomatiques majeures, des négociations prévues à Genève, le Roi a préféré centrer son discours sur les relations entre le Maroc et l’Algérie.
Elles sont très mauvaises et les frontières sont fermées depuis un quart de siècle, ce qui handicape les deux économies, sans parler des opportunités de partenariat ratées.
Le Roi a rappelé les défis communs face au terrorisme, au phénomène migratoire, mais aussi aux questions de développement. Il a aussi évoqué les relations entre les deux peuples, à commencer par la lutte contre le colonialisme, les échanges humains qui perdurent, la communauté de culture, de destin…
Le discours ne s’est pas contenté de mettre en évidence l’incongruité de la situation actuelle et de plaider pour la normalisation. Il a proposé un mécanisme.
Le Roi du Maroc propose une commission mixte, dont les deux parties définiront les niveaux de représentation, pour aplanir toutes les difficultés, poser tous les différends, dans la transparence et la bonne foi. C’est la première fois, qu’une telle offre aussi détaillée, est faite publiquement par le chef de l’Etat, la plus haute autorité du pays.
Le Maroc plaide depuis des années pour la normalisation des relations entre les deux pays en neutralisant le conflit du Sahara. Pour Rabat, le processus onusien est désormais le lieu où les positions des deux pays, antagonistes pour le moment, s’expriment. Cela n’empêche pas la reprise normale des relations entre les deux pays.
Il est d’ailleurs notable que le discours royal n’a eu que des qualificatifs du genre les frères, les voisins, pour qualifier le peuple algérien mais aussi ses dirigeants. Il n’y a eu aucune référence à l’intégrité territoriale et encore moins aux adversaires de celle-ci.
Cette main tendue est celle du bon sens. Dans le monde entier, la tendance est aux grands ensembles. Pour les investisseurs, l’attractivité des marchés de chaque pays pris dans son coin, est très limitée.
Si les frontières s’ouvraient, si les échanges se libéralisaient, nous serions devant un marché de 70 millions de personnes, qui constituera une locomotive pour tout le voisinage.
Que ce soit aux USA ou en Europe, cette vision s’impose depuis des années, dès qu’on parle d’Afrique du Nord. Les deux pays les plus grands de la région ne peuvent se faire face, quand l’intérêt des deux peuples est dans la coopération la plus large.
l’Algérie ne peut plus vivre sur la rente pétrolière. Sa jeunesse, 60% de la population, a des besoins qui ne peuvent être satisfaits sans un essor économique, au-delà de la pétrochimie. L’offre royale peut donc cheminer au sein des élites algériennes soucieuses de l’intérêt des populations et de l’avenir du pays.