Rentrée scolaire : La Défausse (Par Naïm Kamal)

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Une longue vue pour lire l’avenir tributaire d’une équation à plusieurs inconnues

2023
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Si on a bien compris, le ministère de l’Education nationale a préparé, en prévision de la rentrée scolaire, trois modèles selon l’évolution de la situation épidémiologique et a finalement opté pour un quatrième*.

On notera que dans sa déclaration, le ministre de tutelle, Saïd Amzazi, a pris la précaution de préciser que la formule hybride retenue, qui a consisté à « combiner le deuxième et troisième modèle»*, a été décidée « en coordination avec les départements notamment de la Santé et de l’Intérieur sous la supervision du chef du gouvernement ».

On ne va pas faire la sémantique de ce « soit dit en passant » ni entrer dans le détail de ce qu’est le modèle annoncé « impliquant les familles » dans le choix du présentiel ou de l’enseignement à distance, même si, ce faisant, on peut subodorer que ce choix joue la partition des patrons du secteur privé qui ont lobbyé à fond pour un retour en classe pur et simple. Dans sa chronique, Bilal Talidi, dont nous ne partageons pas toujours les opinions, a analysé à notre sens correctement cette option.

           

Entendons-nous ! Il n’est question d’accabler personne. Ni les citoyens, ni le gouvernement et moins encore le ministre de l’Education nationale dans la position peu enviable de punshing-ball. Face au coronavirus et à son Covid-19 dont la science mondiale n’a pas encore cerné l’ensemble des contours, tout le monde tâtonne, pédale un jour et rétropédale le lendemain. Et si l’on doit obligatoirement définir l’état dans lequel le coronavirus place son monde, on dira que c’est l’ignorance devenue le bien le mieux partagé par tous.

Mais s’Il n’y a pas de recette prêt-à-déployer ni de remède miracle à offrir, la différence entre les uns et les autres se joue sur la détermination et la responsabilité entièrement assumée des décideurs. Or, dans la situation actuelle, ce n’est pas de résolution dont font montre les nôtres. Pour ce qui est de la rentrée scolaire, il est même possible de percevoir derrière l’hybridité du modèle retenu une certaine mollesse. De la demi-mesure qui nous situe loin du cran et de l’assurance qui ont caractérisé les actions et les réactions de l’Etat lorsqu’il lui a fallu faire face à l’entrée du coronavirus au Maroc et qui lui a valu d’être souvent donné pour exemple.

Ni fébrile ni frileux, l’Etat marocain a agi sans trembler, prenant les mesures appropriées sur tous les fronts pour endiguer la propagation du virus aussi bien que pour en limiter les conséquences sociales et économiques. Mais avec un déconfinement mal géré, mal expliqué et/ou mal compris, soumis aux pressions à hue et à dia des groupes d’intérêts et des corporations, on s’est retrouvé devant un relâchement des citoyens et en présence de responsables qui donnaient des signes de fatigue. Il en a résulté la situation parfaitement décrite par le Roi Mohammed VI dans son discours à l’occasion de 20 août.

Face aux périls qui se profilent, le Souverain a été on ne peut plus clair. C’est particulièrement le cas lorsqu’il a précisé que « malgré les efforts importants des pouvoirs publics et du secteur de la santé, les hôpitaux [si la situation actuelle persistait] ne seraient plus en mesure de faire face à la pandémie.»

Avec un brin de perspicacité, le gouvernement aurait pu puiser dans le propos royal la meilleure légitimation possible d’une décision univoque pour la gestion de la rentrée scolaire. En lieu et place, on a assisté à un gouvernement qui a choisi de se défausser sur le magma foncièrement partagé et forcément indécis des parents d’élèves pour trouver et assumer, selon un plan préétabli, la décision idoine et ses conséquences aussi graves les unes que les autres.  (N K)

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*Les trois modèles de la rentrée scolaire 2020-2021 élaboré par le ministère de l’Education nationale

- Le premier modèle prévoit l’adoption de l’enseignement présentiel à 100 pc en cas d’amélioration de la situation, alors que le deuxième concerne l'alternance entre enseignement présentiel et auto-enseignement en cas d’amélioration de la situation avec nécessité du respect des mesures préventives.

- Le troisième modèle porte sur le recours uniquement à l'enseignement à distance si la situation épidémiologique s'aggrave.

- En coordination avec les départements notamment de la santé et de l’intérieur, et sous la supervision du chef du gouvernement, le ministère de l'éducation a décidé de combiner le deuxième et le troisième modèles en impliquant les familles dans la prise de décision.

- Les familles qui optent pour l’enseignement à distance seront appelées à remplir un formulaire via le système Massar ou auprès des établissements scolaires.