Culture
''L'oriental et la méditerranée - Au-delà des frontières'' Un livre de Leila Maziane
Leila Meziane Maziane (Université Hassan II, Casablanca) les Marocains ont su développer "une culture maritime" attestée par des fonds d'archives espagnol et français complétés par des études
En ces temps troublés - pandémie de la Covid-19 oblige... - il est bon de regarder ailleurs et de prendre du recul sur le quotidien. La recette de l'heure ? Inviter à lire le livre du professeur Leila Maziane (Université Hassan II, Casablanca) sur "L'Oriental et la Méditerrané e au-delà des frontières" récemment publié par les Editions La Croisée des Chemins et réalisé par l'Agence de l'Oriental. De la belle ouvrage, assurément Un album de quelque trois cents pages, agrémenté de texte et livre sorte de fresque historique de la Mare Nostrum à travers les millénaires.
La Méditerranée ? Une histoire longue, charriée par l'histoire et ses conclusions. Du matériau donc, pour appréhender un espace autour de plusieurs séquences successives. Aux Temps Anciens, c'était un lac carthaginois, puis romain, prolongé par un Maroc méditerranéen. Avec l'époque médiévale, s'affirme la vocation du Maroc vers la mer avec ses conquêtes mais aussi ses défaites. Suit la période moderne, celle des "temps difficiles" avec l'implantation ibérique sur le littoral. Enfin, l'époque contemporaine avec un nouvel élan portuaire. La maîtrise des mers est un levier et un vecteur de puissance - aussi - l'histoire n’en témoigne-t-elle pas suffisamment ; elle a donné un avantage à des puissances maritimes par rapport aux puissances continentales. Dans sa préface, Mohamed Mbarki, le directeur général de l'Agence de l'Oriental, rappelle que "nos ports et abris côtiers jouèrent un grand rôle» : ils étaient une ouverture -"une respiration" écrit-il - pour le Maroc méditerranéen, notamment dans le domaine des échanges extérieurs avec Al Andalous. Pour sa part, Leila Maziane explique que les Marocains ont su développer "une culture maritime" attestée par des fonds d'archives espagnol et français complétés par des études.
Aujourd'hui, cette cote retrouve sa place. Une visibilité. Un grand élan même. Longtemps, elle a été en retrait, du fait des "conquérants de l’ère industrielle" attirés davantage par le grand large océanique. Il faudra, attendre le Nouveau Règne pour qu'elle soit pratiquement réhabilitée comme côte maritime à part entière. C'était là plus qu'un infléchissement, mais autre chose : un changement profond de vision stratégique. Ce fut la décision royale du complexe portuaire Tanger -Méditerranée, aujourd'hui au premier rang en Afrique et au 30 ème rang mondial. C'était là, à marche forcée pourrait-on dire, une réarticulation de l'ouverture maritime du Royaume et son redéploiement sur ce rivage.
Une nouvelle approche qui va se prolonger à l'est, avec le gigantesque et ambitieux programme Nador West Med, en cours de réalisation. Un rééquilibrage en faveur de l'Oriental installant dans cette région un géant portuaire. Tout cela participe d’une vision d'avenir définie par le Souverain, le 18 mars 2003, dans l'initiative Royale de Développement de l’Oriental : "Notre projet stratégie (...) vise à faire de l'espace méditerranéen un puissant levier pour de décollage et de développement national, pour le partenariat économique et pour le brassage culturel".
L'ouvrage témoigne que la vie économique du littoral méditerranéen et de l'Oriental n'était pas séparable de la mer : tant s’en faut. Celle-ci a modelé des cultures. Des comportements. Des arts. Et des traditions. Il met en exergue ainsi tout un monde avec ses particularités sans doute mais aussi ses facteurs d’unité. C'est là le legs de l’histoire : des patrimoines, des pratiques de pêche, des outils, des faits sociaux et économiques. Une culture maritime partagée, composite, plurielle, avec une sédimentation millénaire. Un processus activé lors des deux décennies écoulées pour une "maritimisation" de la côte Nord du Maroc.
Le développement régional est au cœur des politiques publiques. Il est appelé à engranger des acquis mais aussi à s'insérer dans une dimension mondiale. Celle-ci est tournée vers la Méditerranée, vers l'Europe - à une quinzaine de kilomètres de Tanger - mais aussi vers le continent. Demain, la profondeur de l'Oriental en particulier va couvrir des milliers de kilo -mètres parce qu'elle sera l'un des nœuds des voies maritimes et des échanges commerciaux entre les pays et les continents. L'Oriental et la Méditerranée ? C'est une histoire qui ressurgit, qui rebondit, se projetant au-delà des frontières. Ce livre ne peut qu'aider à éclairer des pistes et à appréhender les chemins qui y mènent. Une œuvre ravivant la mémoire historique pour mieux stimuler l'avenir.