International
Afrique du Sud, l’amitié russe, le beurre américain et l’argent de la Chine
Le ministre sud-africain du Commerce et de l'Industrie, Ebrahim Patel - Soupçonnée d’avoir livré des armes à la Russie malgré une neutralité de façade, l’Afrique du Sud est exposée à perdre des avantages commerciaux aux USA.
Johannesburg - L'Afrique du Sud ne peut pas se permettre de perdre les avantages d'Agoa, une loi américaine offrant à plusieurs pays africains un accès en franchise de droits au marché commercial américain, a indiqué jeudi le ministre sud-africain du Commerce et de l'Industrie, Ebrahim Patel.
«Les États-Unis sont notre deuxième plus grand partenaire commercial auquel nous vendons pour environ 15 milliards de dollars de produits par an. Ils suivent la Chine, qui est notre premier partenaire commercial», a déclaré M. Patel aux médias.
Il rendait compte des pourparlers de l'Afrique du Sud avec les Etats-Unis pour la reconduction des avantages de l’Agoa au milieu des tensions récentes entre les deux pays, suscitées par l’envoi présumé par Pretoria d’armes et de munitions à la Russie.
Plus tôt en juillet, Patel, aux côtés du ministre des Finances Enoch Godongwana, s'est rendu à Washington pour discuter de l'état des accords commerciaux entre les deux pays. Ceci au milieu des craintes que l'Afrique du Sud risque de perdre les avantages du programme commercial de l’AGOA, en raison de son soutien présumé à la Russie et de sa position vis-à-vis du conflit en Ukraine.
Pretoria a demandé à Washington d'envisager une prolongation anticipée de l'Agoa, qui doit expirer en 2025. L'Afrique du Sud, l'une des économies les plus développées du continent, est le plus grand bénéficiaire de l’Agoa, exportant l'année dernière environ 3 milliards de dollars de marchandises vers les États-Unis via cette Loi.
En mai dernier, l'ambassadeur américain à Pretoria, Reuben Brigety, a accusé l’Afrique du Sud d’avoir fourni des armes à la Russie. Les Etats-Unis sont convaincus que «des armes et des munitions ont été chargées», début décembre 2022, à bord du cargo russe amarré près du Cap Lady R, en dépit de sa neutralité déclarée dans le conflit en Ukraine, a déclaré Brigety lors d’une conférence de presse.
Ebrahim Patel a reconnu que la question de Lady R avait également été soulevée lors des pourparlers. L'incident du Lady R, également connu sous le nom de #LadyRussiagate, fait référence à l'amarrage du cargo russe sanctionné, le Lady R, à la base navale de Simon's Town en Afrique du Sud et à l'impact diplomatique qui en résulte. Le navire transportait une cargaison militaire pour la Russie. "Sans aucun doute, c'était bien que nous y soyons allés, mais cela nous a également permis d'entendre certaines des préoccupations spécifiques. Un certain nombre de décideurs américains ont fait part de leurs inquiétudes et ont voulu savoir ce que nous faisions au sujet de l'enquête sur le Lady R», a-t-il dit.
Un groupe bipartite de législateurs américains a demandé à l'Administration Biden de «punir l'Afrique du Sud pour ce qu'il considère comme le soutien du pays à la Russie». Les législateurs ont appelé à déplacer la conférence commerciale d'Agoa prévue cette année en Afrique du Sud à un autre pays.
Il s'agit du premier effort concret de représailles de la part de membres du gouvernement américain face à l'opinion croissante à Washington selon laquelle les relations entre l'Afrique du Sud et la Russie évoluent dans une direction qui menace les intérêts nationaux américains.