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Côte d'Ivoire: le président Alassane Ouattara, suite à la mort brusque début juillet de son dauphin candidat à un troisième mandat
Lassane Ouatara, président de la Cote d’Ivoire, tenté par un troisième mandat, a dû se contenter de ses deux mandats et renoncer par respect de la constitution et de crainte que cette tentation jette le pays dans une nouvelle guerre civile. La mort subite début juillet de son dauphin désigné, le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly en a décidé autrement. Faute d’alternative le voilà parti pour un nouveau mandat.
Invoquant un "cas de force majeure", le président ivoirien Alassane Ouattara a annoncé jeudi qu'il allait briguer un troisième mandat à l'élection présidentielle d'octobre, ce dont l'opposition lui conteste le droit en vertu de la Constitution.
Le président ivoirien Alassane Ouattara salue ses partisans lors d'un meeting de son parti, le 29 juillet 2020 à Abidjan
Le chef de l'Etat ivoirien a donc mis fin au suspense qui prévalait en Côte d'Ivoire depuis quelques semaines, même s'il avait laissé entendre la semaine dernière qu'il se représenterait, après la mort brusque début juillet de son dauphin désigné, le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly.
"J'ai décidé de répondre favorablement à l'appel de mes concitoyens me demandant d'être candidat. Je suis donc candidat à l'élection présidentielle du 31 octobre", a-t-il déclaré, ajoutant que la constitution l'y autorisait, dans un discours de près de 25 minutes à la télévision publique à la veille du 60e anniversaire de l'indépendance de la Côte d'Ivoire.
M. Ouattara, 78 ans, a pris soin d'expliquer sa décision, un revirement puisqu'il avait annoncé solennellement en mars qu'il allait "laisser la place aux jeunes générations", avant d'adouber M. Gon Coulibaly, lequel a succombé à un infarctus le 8 juillet à l'âge de 61 ans.
"J'ai fait part le 5 mars dernier à toute la Nation de ma volonté, bien que la nouvelle constitution m'y autorise, de ne pas faire acte de candidature et de passer la main à une nouvelle génération". "Depuis cette décision, j'avais commencé à organiser mon départ (...) et planifier ma vie après la présidence", a raconté Alassane Ouattara, qui s'exprimait debout derrière un pupitre, à côté d'un drapeau ivoirien.
Mais "le décès du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly laisse un vide". "Le calendrier très serré, à peine à trois mois de la présidentielle", "les défis auxquels nous sommes confrontés, le maintien de la paix et la sécurité", la "crise sanitaire" (du coronavirus), "le risque que tous nos acquis (depuis 2011) soient compromis", "tout cela m'amène à reconsidérer ma position", a justifié M. Ouattara, avant d'annoncer sa candidature.
"Cette décision mûrement réfléchie est un devoir que j'accepte dans l’intérêt supérieur de la nation". "Compte tenu de l'importance que j'accorde à mes engagements et à la parole donnée, cette décision représente un vrai sacrifice pour moi, que j'assume pleinement par amour pour mon pays", a-t-il affirmé.
- La question constitutionnelle -
Le 29 juillet, devant le conseil politique de son parti, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) qui le pressait de se présenter, le président Ouattara avait demandé qu'on lui laisse "le temps du recueillement et de la récupération" pour faire le deuil d'Amadou Gon Coulibaly, son plus proche collaborateur depuis 30 ans, qu'il appelait "son fils". Il avait ajouté qu'il s'adresserait à la Nation pour faire part de sa décision.
Dès avant son annonce, la candidature à un troisième mandat d'Alassane Ouattara, élu en 2010 puis réélu en 2015, était contestée par l'opposition.
L'ex-président Henri Konan Bédié a ainsi déclaré récemment que cette candidature "serait illégale". Agé de 86 ans, il est lui-même le candidat désigné du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI), principale formation d'opposition.
La Constitution limite à deux le nombre de mandats présidentiels. Mais selon l'interprétation du pouvoir, l'adoption de cette nouvelle loi fondamentale en 2016 a remis les compteurs à zéro.
Outre M. Bédié, plusieurs candidats se sont déjà déclarés pour la présidentielle d'octobre.
L'ex-chef de la rébellion Guillaume Soro, 47 ans, ancien Premier ministre de M. Ouattara passé dans l'opposition l'an dernier, a été condamné à 20 ans de prison par la justice ivoirienne pour "tentative d'insurrection" peu après s'être déclaré candidat. Il vit en exil en France.
L'opposant Pascal Affi N'Guessan, 67 ans et ancien proche de l'ex-président ivoirien Laurent Gbagbo, s'est déclaré candidat samedi, au nom de l'une des deux factions du Front populaire ivoirien (FPI), la deuxième grande formation d'opposition.
Mais les fidèles de Laurent Gbagbo attendent son retour, depuis son acquittement par la Cour pénale internationale de La Haye, et accusent le pouvoir ivoirien de manoeuvrer pour l'empêcher.
Deux anciens alliés du président Ouattara se sont aussi déclarés candidats ces dernières semaines : l'ex-ministre l'Enseignement supérieur Albert Mabri Toikeusse, 58 ans, dirigeant d'un petit parti qui a rompu avec le pouvoir, et l'ex-ministre des Affaires étrangères Marcel Amon Tanoh, 68 ans.
La situation politique est tendue en Côte d'Ivoire à trois mois de la présidentielle, dix ans après la crise post-électorale qui avait fait 3.000 morts.