La France vue par des Français : De crise en crise, un ordre policier en marche

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Une photo qui date de 2019 déjà, la victime n’est pas un ‘’français de papier’’, mais un ‘’français de souche’’, le jeune Arthur N., 23 ans, victime d'une "agression gratuite" à Lyon pendant la manifestation pour les retraites

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Il y a près d’un demi-siècle, décédait l’humoriste français Coluche, resté dans l’histoire pour son humour cinglant, mais surtout pour avoir été en 1985 le fondateur des Restos du Cœur, qui témoignaient déjà de ce qu’est l’exclusion, la marginalité et la fragilité sociale dans ce pays qui était alors la quatrième puissance économique mondiale. C’est lui qui nous inspire aujourd’hui ce titre La France vue par des Français. C’est lui qui, dans un savoureux sketch, avait fait le distinguo : les Français parlent aux Français, les Français parlent aux Arabes.  

Vidéo des Français parlent aux Français : 38’’

Les Français parlent aux Français

De crise en crise, la France offre un spectacle “inquiétant” (Le Figaro)

Paris - De crise en crise, la France offre, ces derniers temps, un spectacle “inquiétant, peu sympathique”, celui d’un pays “hors de contrôle, où les colères s’additionnent dans une atmosphère irrespirable”, écrit le Figaro dans son éditorial, lundi.

''La planète a d’abord découvert, intriguée, les gilets jaunes, la France des périphéries criant son désarroi face à la mondialisation. Puis, ahurie, elle a assisté à la longue empoignade des retraites'', souligne l’éditorialiste sous le titre “le naufrage français”

“Et maintenant explose cette jeunesse qui casse tout. Celle-ci n’est pas toute la jeunesse française, mais elle donne l’image détestable d’une nation encagoulée, 'ensauvagée', 'tiers-mondisée', qui n’a plus le respect d’elle-même”, soutient-on.

Dans un an, c’est ce pays qui accueillera les Jeux olympiques d’été, souligne le commentateur, pour qui la question n’est pas de savoir s’il sera prêt, mais s’il sera digne de cet événement.

La mort du jeune Nahel au volant de sa voiture par un tir policier à bout pourtant mardi à Nanterre, en banlieue parisienne, a suscité une vague d’indignation et déclenché une vague de violences qui se sont poursuivies pendant cinq soirées, avec plus de 3000 interpellations.

Les magistrats pointent un ordre policier en marche

L'autorité judiciaire "pâtit, loi après loi, de la construction d’un ordre policier qui rogne sur les droits et libertés des citoyens, les prive de l'accès à la justice et empêche un réel contrôle judiciaire de la police, au nom de la sécurité", souligne le syndicat de la magistrature.

“Ce n’est pas à la justice d’éteindre une révolte”, lance le syndicat dans un communiqué, en réaction aux violences urbaines qui secouent la France, depuis mardi dernier, après la mort d’un jeune par un tir policier à bout portant à Nanterre.

'’Hier laxiste, endoctrinée, politisée, accusée de tous les maux, la justice serait donc de nouveau parée de ses vertus pacificatrices ?’’ s’interroge le syndicat, estimant que la rhétorique du ‘respect du travail de la justice’, “servie ad nauseam par le gouvernement, le chef de l’État, certains syndicats de police et tous les détracteurs habituels de l’indépendance de la justice ne sert qu’un objectif : celui de ne pas regarder en face la question systémique que soulève, une fois encore, la mort d’un adolescent d’un quartier populaire sous les balles de la police”.

Comment ne pas analyser cette soudaine déférence à l’égard de la justice comme une instrumentalisation et une lamentable dérobade ? se demande-t-on, soulevant qu’au-delà de la question du traitement judiciaire de l’affaire, la question que pose la mort d’un adolescent tué par un policier après un refus d’obtempérer est “bel et bien politique”.

Si l’institution judiciaire doit, entre autres, cultiver chaque jour son indépendance, y compris à l’égard de la police et combattre – et non se laisser emporter – par ce réflexe de criminalisation des victimes complaisamment relayé par certains médias, “elle ne peut rien, ou si peu, contre un discours politique délétère qui nie l’existence même des violences policières ou des pratiques discriminatoires des forces de l’ordre”.

Le Syndicat demande ainsi l’abrogation de l’alinéa 4 de l’article L.435-1 du code de la sécurité intérieure, qui permet l’usage des armes en cas de refus d’obtempérer, relevant que la hausse “terrifiante” des morts et blessés par des tirs policiers dans le cadre de contrôles routiers sont autant de preuves “tragiques d’une insécurité grandissante pour les citoyens dans leurs relations avec la police”.

Il demande aussi l’inscription dans la loi du principe d’un dépaysement de toute enquête sur des violences policières et dans l’attente que ce dépaysement soit obligatoire, qu’il soit systématiquement décidé par les procureurs généraux.

Comment un magistrat, procureur ou juge d’instruction, qui travaille au quotidien avec les policiers de son ressort et leur hiérarchie peut-il rester impartial lorsqu’il doit enquêter sur l’un d’eux ? s’interroge le syndicat de la magistrature, qui appelle aussi à la création d’un service d’enquête indépendant et à des réformes profondes dans les pratiques policières et judiciaires, “seule voie pour restaurer la confiance des citoyens dans leur police et leur justice”.

Perte de confiance dans les élus et la loi

‘’Un homicide policier « de trop »’’ écrit dans Le Monde du 2 juillet le politologue Sebastian Roché, directeur de recherche au CNRS. Il a mis le feu aux banlieues. Mais quel est le carburant qui a été enflammé ? Il est composé des émotions accumulées par les adolescents, lors de ces contacts ordinaires avec des policiers, faits de peur et d’humiliation. La jeunesse y est particulièrement sensible, plus que tout autre segment de la population. Ces expériences engendrent non seulement un rejet de la police, mais aussi une perte de confiance dans les élus et la loi, et un effondrement de la croyance dans la valeur des processus démocratiques. Ceci explique que les appels au calme ou la décision de mettre le policier en examen pour homicide volontaire n’ont guère d’effet d’apaisement.’’

‘’La discrimination et la brutalité sont régulières, lors des contrôles d’identité, poursuit-il précisant que :.’’Nous disposons maintenant de plus d’une dizaine d’enquêtes de politistes, démographes ou du défenseur des droits qui prouvent l’existence de contrôles au faciès de Paris à Marseille en passant par Lyon. La discrimination est un délit, quand bien même un policier en est l’auteur.’’

La campagne de reconquête de Macron n'a pas dissipé l'effet de fin de règne (Le Point)

La campagne de reconquête menée par le président français, Emmanuel Macron, n'a pas permis de dissiper l'effet de fin de règne et de léthargie qui pèse sur le pouvoir depuis le début de son second mandat, écrit, jeudi l’hebdomadaire “Le Point”.

Le président sature son emploi du temps de contacts avec les Français et de promesses en cascade, souligne l’auteure de l’article qui se demande s’il s’agit d’”une fuite en avant'' du chef de l’État.

Évoquant “la performance jupitérienne” du président, l’article intitulé “Emmanuel Macron pris dans le tourbillon des cent jours” relève que le chef de l’État est descendu dans l'arène, à un moment où plus de 70 % du pays faisait part de son rejet, “où on le disait claquemuré en son Château”.

“On l'a vu embarqué tous azimuts dans une frénésie d'annonces à coups de milliards d'euros, dans une surenchère dépensière qui ne surprend plus personne”, note-t-on, ajoutant que sa meilleure assurance-vie c’est lui-même. “Le fantasme narcissique de la toute-puissance”, renchérit-on.

Emmanuel Macron s'est mué en “homme-orchestre” avec des promesses présidentielles qui “donnent le tournis”, relève Le Point.

"Les gens ne sont pas dupes. Ils se disent : tous ces milliards, c'est de l'argent magique"", selon un élu du premier cercle macronien, cité par le magazine.

Comme toujours, poursuit-on, Emmanuel Macron en fait trop et les Français se sont habitués aux “outrances” de ce “jeune président, adepte d'une communication excessive, d'une mise en scène permanente”, remarque le média, qui évoque une “ère d'optimisme en trompe-l'œil”, puisque cette ''campagne de reconquête menée par le chef de l’État n'a pas permis de dissiper l'effet de fin de règne et de léthargie qui pèse sur le pouvoir depuis ce début de second mandat''.

Si entre 2017 et 2022, le président avait trouvé les thèmes, les mots, il est désormais, dans “l'improvisation, l'indéfinition permanente”, regrette un acteur de premier plan, cité par le Point.

“À la rentrée, sa formule sur la 'fin de l'abondance' laissait entrevoir une ligne qu'il aurait pu décliner et qui donnait un sens à son Conseil national de la refondation. Or il se contente d'ajouter des rendez-vous à des rendez-vous, des thèmes à des thèmes pour tourner une page…qui n'existe pas. L'agenda présidentiel ne peut se limiter à des visites ou des inaugurations de maisons France services'', soutient-on de même source.

Et d’ajouter qu’au Parlement, les textes sensibles ont été mis en jachère, en attendant des jours plus favorables, alors que la majorité reste “fébrile, traumatisée par le procès en déni de démocratie”.

Les députés légifèrent sur le numérique ou les drapeaux européens sur le fronton des mairies, ''des petits textes qui ne veulent pas dire grand-chose'', selon une figure du Palais-Bourbon.

Aux yeux de l’auteure de l’article, la frénésie et l'omniprésence présidentielles “contrastent avec l'atonie des ministères et des administrations centrales, qui tournent souvent au ralenti, démobilisés par la petite musique usante de l'imminence d'un remaniement qui ne vient pas”.

“La perspective du budget à l'automne donne des sueurs froides à l'exécutif. En plus de mesures d'économies douloureuses, notamment dans les dépenses de santé, la chorégraphie des 49.3 à répétition peut virer au cauchemar, avec une motion de censure qui finit par être adoptée, renversant le gouvernement”, ajoute-t-on.

Le scénario étant enterré à court terme, le camp du président tente de s'accommoder d'une “instabilité et d'une tension permanentes” à l'Assemblée. Les cent jours confirment donc aussi l'impossibilité pour Emmanuel Macron d'élargir sa majorité, martèle-t-on.