Tunisie : Face à un ''péril imminent'', Saïed se pose en sauveur

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Le président tunisien Ka¨s Saïed, « libre de ses actes » : « Le pays est en train de vivre aujourd’hui un instant historique »

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Tunis - Pour répondre à ses détracteurs qui ne cessent de le critiquer pour son laxisme, l'attentisme qu'il a imposé au pays depuis le 25 juillet, le président tunisien Kaïs Saïed a affiché une attitude offensive en annonçant lundi soir le maintien des mesures exceptionnelles et la prochaine entrée en vigueur de mesures transitoires.

Dans un discours prononcé à l’adresse des Tunisiens à Sidi Bouzid, berceau de déclenchement de la révolution de 2011, il a dénoncé les graves manœuvres orchestrées par certaines parties pour plonger le pays dans le chaos et le doute.

Pour lever toute équivoque sur les mesures d'exception qu'il a décidées le 25 juillet dernier, notamment le gel des activités du parlement, la levée de l’immunité des députés, le limogeage du chef du gouvernement, le président Saïed a affirmé sans détours qu’elles ont été rendues inévitables pour sauver le pays d'un "péril imminent" à la fois extérieur et intérieur.

‘’Les droits et libertés sauvegardés’’

Des mesures qui ont permis de "sauver une révolution" qui a été déviée de ses principes fondateurs et constituent "un mouvement révolutionnaire rectificatif du processus qui s’est déclenché le 17 décembre 2010 précisément de Sidi Bouzid".

Tout en adressant ses pics à tous ceux qui sont responsables de la débâcle que connaît le pays, le président tunisien s’est montré également rassurant, soutenant que "les droits et libertés ne seront en aucune manière remis en cause".

Sans décliner le nom du futur chef de gouvernement, le président de la république a annoncé la prorogation, jusqu’à "nouvel ordre", des mesures d’exception, l’entrée en vigueur prochaine de mesures transitoires et son intention de procéder à une révision de la loi électorale, cause principale de la dispersion des pouvoirs.

Pour le président Saïed, le pays fait face toujours à un grave péril qui menace l’Etat, faisant valoir que "des milliards de dinars ont été versés depuis des pays étrangers pour discréditer le pays et même pour perpétrer des assassinats" justifiant en même temps les décisions prises qui déclinent un fort sentiment de responsabilité pour préserver l’Etat tunisien.

En revanche, aucune affirmation claire sur un amendement de la Constitution. Le président tunisien s’est contenté de soutenir que le texte fondamental est censé être l’expression d’une volonté populaire, malheureusement usurpée et bafouée.

Sarcastique et direct

Adressant un clin d’œil aux citoyens venus assister à son discours et qui réclamaient la dissolution du parlement, le président Saïed a annoncé que le 17 décembre 2010 devrait être considéré comme la date du déclenchement de la révolution de la liberté et de la dignité et non le 14 janvier 2011 qu’il a qualifiée de date de son usurpation.

Tout en réitérant que le 25 juillet 2021 constitue une sorte de "révolution rectificative" qui a permis de rendre la légitimité au peuple, le président tunisien a répondu avec force aux critiques qui ont fusé ces derniers temps, au sujet du retard pris dans la désignation du chef de gouvernement, des accusations qui lui ont été faites de "coup d’état, de non-respect des droits et libertés ou de volonté d’amender la constitution de 2014.

Les réponses du président tantôt sarcastiques, tantôt directes voire même violentes, ont ciblé les organisateurs de la manifestation de samedi dernier en plein centre de la capitale.

Il a affirmé que l'échec patent de leur action renvoie à une "mauvaise mise en scène, à des réalisateurs à court d’idées et à des acteurs de pacotille".

Tout en réaffirmant sa fidélité aux engagements qu’il a pris envers le peuple et qu’aucun retour en arrière ne sera opéré, le président tunisien a estimé que les défis que le pays est en train d’affronter ne feront que renforcer sa détermination et sa volonté pour les relever et pour aller de l’avant sans hésitation, ni craintes et sans céder aux sons des sirènes qui prônent l’anarchie, la discorde et la peur.

‘’L’article 80, une décision personnelle’’

Le président Saïed a tenu à rappeler que l’activation de l’article 80 de la Constitution et la mise en œuvre de mesures exceptionnelles "furent une décision personnelle que j’ai prise au bon moment. Une décision qui a permis de discerner les vrais patriotes des autres qui ont choisi de vendre le pays".

A tous ceux qui n’ont cessé de critiquer le retard pris dans la désignation d’un chef de gouvernement, M. Saïed a indiqué que les masques sont tombés. Il a fait savoir qu’ils "attendaient des désignations, au moment même où la véritable question concerne la défaillance de tout un système".

"Mon souci, a-t-il renchéri, consiste à protéger le pays, non de répartir des postes à des traîtres qui cherchent à travers la formation du gouvernement à revenir à la situation qui prévalait le 24 juillet".

Au sujet de l’Assemblée des Représentants du Peuple (parlement gelé), le président a affiché un ton inquisiteur, estimant qu’ils "prétendent combattre la corruption au moment où, tels des criquets pèlerins, ils ne daignent pas mettre aux enchères l’adoption de certaines lois" dans un hémicycle transformé en arène de combats politiciens, de diatribes et même d’échange de violence physique".

Et de s’exclamer : "comment peuvent-ils être des représentants du peuple?

‘’Un instant historique’’

Au sujet de la Constitution, expression de la légitimité populaire, le chef de l'Etat tunisien a fait savoir qu’elle a été bafouée et mise à mal depuis plus de dix ans.

Il s’est interrogé sur un air moqueur : "Comment peut-on faire un coup d’Etat au moment même où je veille à la stricte et juste application de la constitution et que toutes les mesures mises en œuvre n’enfreignent aucune de ses dispositions".

Nonobstant ce constat, il a réaffirmé que toutes les dispositions relatives aux droits et libertés resteront en vigueur et seront respectées.

Il conclut que le pays est en train de vivre aujourd’hui un instant historique, réaffirmant que sa visite à Sidi Bouzid "apporte une réponse cinglante à ceux qui prétendent que le président n’est plus libre de ses actes", précisant qu’il s’est déplacé dans cette région pour lever tout quiproquo et afin que la Constitution soit réellement l’émanation de la volonté populaire.

 

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