Tanger : La Villa du journaliste-espion britannique retrouve sa splendeur d'antan

5437685854_d630fceaff_b-

La villa Harris était à l’époque la demeure du journaliste auteur de plusieurs ouvrages sur le Royaume, notamment Le Maroc disparu en 1929, mais également une sorte de "club" où se réunissaient plusieurs personnalités connues de Tanger qui permettait au journaliste qui avait des accointances avec les services de renseignement britannique de recueillir et de recouper ses informations sur un Royaume chérifien dans le tumulte de l’époque pré-protectorat. Tanger était alors la capitale diplomatique

837
Partager :

Tanger - Nichée au cœur de Malabata, un des quartiers les plus prisés de Tanger, la Villa Harris, endroit mythique de la ville, a fait peau neuve après plusieurs années d'abandon, ravivant ainsi toute une époque et une histoire méconnue par certains et oubliée par d’autres.

Dire que la Villa Harris a connu plusieurs vies serait un euphémisme. Cette bâtisse, construite à la fin du XIXème siècle par Walter Burton Harris, journaliste du Times au Maroc, a vu défiler les décennies et les propriétaires, bénéficiant de plusieurs reconversions, avant d’être inscrite au patrimoine national.

En s’installant à Tanger, Walter Burton Harris aurait été envoûté par la beauté de la ville du Détroit et décidé d’y construire une villa grandiose entourée d’un énorme jardin qu’il a aménagé avec beaucoup de soin et dans lequel il a décidé de cultiver des essences et plantes rares, dont certaines considérées uniques au Maroc, a confié à la MAP le conservateur régional du patrimoine de Tanger-Tétouan-Al Hoceima, Larbi El Mesbahi.

Cette villa était, à l’époque, non seulement le domicile du journaliste, mais également une sorte de "club" où se réunissaient plusieurs personnalités connues de Tanger, que ce soit dans le domaine politique, diplomatique, économique ou encore le domaine des médias, raconte M. El Mesbahi, notant qu’une grande partie des questions importantes discutées à Tanger se déroulait à la Villa Harris.

Féru de culture marocaine et arabo-musulmane, Walter Burton Harris avait construit sa demeure en se référant au style de l’architecture marocaine traditionnelle, choisissant de l’orner avec du plâtre sculpté à la manière traditionnelle, de la boiserie et de la mosaïque traditionnelle marocaine (Zellige).

Pour M. El Mesbahi, ce choix architectural, qui mêle une conception occidentale à un style marocain traditionnel, fait de ce monument un réel symbole de brassage culturel et de dialogue interculturel.

Vers les années 30 du XXème siècle, Harris, ruiné par ses dettes de jeu, cède sa maison à un Espagnol qui transforme la demeure en Casino, avant d’être rachetée durant les années 60 par le Club Med (Club Méditerranée). Un village de vacances est alors aménagé autour de la Villa Harris faisant le bonheur de plusieurs touristes jusqu’aux années 90.

Après le départ du Club Med, Villa Harris est restée inhabitée et ses jardins inexploités, se dégradant avec le temps. C’est en 2007, année de son inscription au patrimoine national, que cette bâtisse mythique bénéficie enfin de l’attention qui lui est due.

Avec le lancement du Grand projet Tanger-Métropole, un chantier Royal d'envergure, Villa Harris a été intégrée aux projets de restauration et de réhabilitation, faisant ainsi peau neuve en 2017, indique M. El Mesbahi.

En plus d’être un repère de la ville de Tanger, Villa Harris fait partie de l’identité et de l’histoire civilisationnelle et culturelle de la ville, a poursuivi le conservateur régional du patrimoine, affirmant que cet endroit représente une valeur inestimable pour la mémoire de la ville, ainsi que le mouvement diplomatique et journalistique à Tanger et au Maroc.

La réhabilitation de cet espace, destiné à retracer une période de l’histoire de la ville de Tanger ainsi que sa valeur exceptionnelle, s’inscrit d’ailleurs dans le cadre d’un programme de mise à niveau de différents sites, qui va permettre, comme l’a expliqué Nassime Gmira, chargée de la coopération internationale au sein de l'Agence pour la promotion et le développement du Nord (APDN), de classer la ville de Tanger au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Selon Mme Gmira, également point focal des projets culturels au sein de l’APDN, l’intérêt de la réhabilitation de cet espace ne se limite pas uniquement à l’aspect culturel. En effet, il s’agit aussi de lui donner une vocation qui peut apporter à Tanger un développement économique et touristique, tout en aménageant un espace où les habitants de la ville pourraient se retrouver à travers des activités culturelles ou encore sportives.

L’APDN a donc veillé à inscrire sa participation à la réhabilitation et à la mise à niveau de la Villa Harris dans le cadre de l’intervention transversale et complémentaire qu’elle opère auprès de l’ensemble des actions entreprises au niveau de la région, qu’il s’agisse de la réhabilitation, de l’aménagement ou encore de la promotion des monuments historiques.

Cette intervention transversale permet d’introduire la dimension culturelle dans le développement de la région, et la Villa Harris en est la preuve concrète. Cet espace, riche de par son histoire, sa beauté et sa symbolique, contribuera, sans nul doute au renforcement du rayonnement culturel de la ville cosmopolite de Tanger.

 

lire aussi