Afrique-Japon et les déboires du XXème siècle - Samir Belahsen

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Vue de la conférence de Sadaharu Kataoka, School of International Liberal Studies de l’université japonaise Waseda au Policy Center for New South - La politique étrangère japonaise a lentement évolué au fil des décennies, passant d'une position de réserve et de non-belligérance à une posture plus proactive sur la scène internationale

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Mardi dernier, j’ai été ris part à une discussion avec le professeur Sadaharu Kataoka, School of International Liberal Studies de l’université Waseda au Japon sur le futur des relations Japon-Afrique et les relations Maroc-Japon qui s’est tenue le mardi 6 février 2024 au siège du Policy Center for the New South- campus de l’université Mohamed VI Polytechnique de Rabat

Avant de partager avec vous quelques réflexions inspirées par l’évènement, il faut que je vous avoue mon intérêt pour le Japon et mon affection pour sa littérature qui n’est pas d’origine académique. 

La politique étrangère japonaise a été marquée par une certaine réserve depuis la Seconde Guerre mondiale. Après la guerre, le Japon s'est engagé dans une politique de non-belligérance et avait adopté une approche plus orientée vers la coopération économique et diplomatique. 

Cependant, le Japon a également renforcé ses alliances stratégiques, en particulier avec les États-Unis, et a joué un rôle actif dans la promotion de la paix et de la stabilité régionale en Asie. 

Puis, le Japon a dû progressivement réévaluer ses priorités en matière de sécurité et a cherché à jouer un rôle un peu plus actif sur la scène internationale, dans le contexte des tensions croissantes en Asie de l'Est. Ceci est notamment illustré par la révision de l'article 9 de la constitution japonaise, qui limitait l'usage de la force militaire.

Le Japon s'est également engagé dans des partenariats économiques stratégiques avec divers pays, notamment en Asie du Sud-Est et en Inde, et a cherché à jouer un rôle dynamique dans des initiatives régionales telles que le Partenariat économique global régional (RCEP) et le partenariat transpacifique global et progressiste (CPTPP). 

En somme, la politique étrangère japonaise a lentement évolué au fil des décennies, passant d'une position de réserve et de non-belligérance à une posture plus proactive sur la scène internationale, tout en demeurant sensible aux préoccupations de sécurité et de stabilité régionale.

La politique africaine du Japon est devenue de plus en plus importante ces dernières années. Le Japon a cherché à renforcer ses liens économiques et diplomatiques avec les pays africains, reconnaissant le potentiel de croissance du continent. Le Japon s'est engagé à accroître son soutien au développement en Afrique, en mettant l'accent sur le renforcement des infrastructures, le développement des ressources humaines et la promotion des investissements. 

Le Japon a institutionnalisé la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l'Afrique (TICAD), une plateforme majeure visant à promouvoir le développement économique et social en Afrique.

La première TICAD  était organisée par le Gouvernement japonais et depuis lors est une collaboration avec les Nations Unies, le (PNUD), la Banque Mondiale et la Commission de l’Union Africaine avec l’appui des organisations internationales et régionales, des pays donateurs, des pays asiatiques, le secteur privé et les organisations de la société civile, qui œuvrent au développement de l’Afrique.

TICAD I : Tokyo, Octobre 1993

La Première Conférence (TICAD I) avait pour objectif de remédier à la baisse des aides au développement de l’Afrique, ayant coïncidé avec la fin de la guerre froide.

TICAD II : Tokyo, Octobre 1998

Cette deuxième conférence s’était intéressée aux défis du développement africain, avec l’objectif de la réduction de la pauvreté et l’intégration de l’Afrique dans l’économie mondiale.

TICAD III : Tokyo, Octobre 2003

La Troisième Conférence a signé l’engagement explicite du forum pour soutenir le NEPAD (Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique), le développement et la croissance socio-économique de l’Afrique.

TICAD IV : Yokohama, Mai 2008

La Quatrième Conférence s’est focalisée sur trois axes prioritaires : la stimulation de la croissance économique, la sécurité humaine et, les questions environnementales.

TICAD V : Yokohama, Juin 2013

La Cinquième Conférence (TICAD V) a marqué le 20ème anniversaire du forum TICAD et le 50ème anniversaire de l’Organisation de l’Unité Africaine/ l’Union Africaine.

TICAD VI : Nairobi, Août 2016

La Sixième Conférence TICAD VI est la première conférence qui s’est déroulée sur le Continent africain, à Nairobi au Kenya. 

TICAD VII : Yokohama, Août 2019

La Septième Conférence (TICAD VII) a reconnu pour la première fois, les entreprises privées comme partenaire officiel de la Conférence.

TICAD VIII : Tunis, Août 2022

Trois thèmes ont focalisé les discutions pendant cette dernière édition : "Atteindre une croissance durable et inclusive avec une réduction des inégalités économiques", "Parvenir à une société durable et résiliente fondée sur la sécurité humaine" et "Construire une paix et une stabilité durables en soutenant les propres efforts de l'Afrique".

La politique africaine du Japon témoigne d'un engagement timide mais croissant envers le continent. Je persiste à croire que seule une meilleure connaissance de la culture des deux parties peut combler le fossé de cette distance psychologique entre les deux parties. Il reste que l’Afrique devrait se libérer de ses attaches héritées de la colonisation, le Japon devant se libérer de l’héritage de la deuxième guerre…

En définitive, on pourrait bâtir si on arrive, alors qu’on a pratiquement consommé le premier quart du vingt-unième siècle à  « dépasser » le vingtième et ses déboires.