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Deux remèdes, au choix, pqour les six péchés capitaux des examens du baccalauréat – Par Bilal Talidi
La division des matières examinées entre l'examen régional et l'examen national, un principe qui a contribué à l'émergence de deux graves fléaux.
Aujourd'hui, il est nécessaire de réformer le système des examens. En cours depuis longtemps il a révélé l’ensemble de ses défauts se transformant au fil du temps en un mécanisme intelligemment exploité par certains pour nuire au principe d'égalité des chances.
D'un point de vue formel, on peut considérer que le système des examens du baccalauréat au Maroc est le plus long examen au monde, car il s'étend sur une période de presque deux mois (juin et juillet), sans compter le dernier contrôle continu, sinon on pourrait parler de trois mois. Une situation caractérisée par l’absurdité de l'enchevêtrement des examens (examen régional, examen national avec ses deux sessions, et tout ce qui les accompagne comme corrections, délibérations, annonce des résultats).
Commençons d'abord par l'effet le plus grave de la division des matières examinées entre l'examen régional et l'examen national. Ce principe a contribué à l'émergence de deux graves fléaux. Le premier réside dans les dérives pédagogiques auxquelles recourent de nombreux établissements d'enseignement privé. Lors du second semestre de la première année du baccalauréat, ils annulent l'enseignement de toutes les matières non certificatives (qui ne sont pas examinées lors de l'examen régional) pour se concentrer uniquement sur les matières certificatives, en augmentant la fréquence de leurs cours. Cette pratique, devenue quasi générale, compromet en profondeur le principe d'égalité des chances avec les élèves des établissements publics, qui sont tenus de terminer tout le programme scolaire et d'enseigner toutes les matières, y compris celles qui ne sont pas certificatives. Plus grave encore, certaines écoles privées ont transféré cette pratique aux classes de tronc commun, où elles enseignent le programme de première année du baccalauréat au second semestre, afin de préparer les élèves à l'examen régional de l'année suivante, en totale déviation du programme et des cadres légaux, aggravant ainsi la violation du principe d'égalité des chances. Mais pas seulement puisque ce faisant ils réduisent le champ des connaissances dont un élève doit se munir pour affronter les études supérieures et plus généralement la vie.
La seconde problématique concerne le type de matières enseignées en première année de baccalauréat. Le critère sur lequel repose la division des examens en deux années (régional et national) est basé sur l'examen des élèves en matières littéraires la première année, et en matières scientifiques la seconde. Cela pose un problème sérieux pour les élèves des filières scientifiques, car ils doivent concentrer leur attention sur les matières littéraires en première année, alors que leur spécialité et ce qui les attend l'année suivante sont les matières scientifiques. Ainsi, le plus grand problème de l'examen des élèves scientifiques en matières littéraires la première année est que le système d'examen crée une rupture dans le cursus d’acquisition. Sans qu'ils s'en rendent compte, les candidats au bac scientifique se transforment en élèves littéraires au détriment de leur matière de base.
Un autre effet secondaire grave produit par le système des examens du baccalauréat est la discrimination qu’il institue entre l'élève scolarisé (officiel) et l'élève non scolarisé (candidat libre). L'officiel est soumis à une période d'examen de deux ans, tandis que la durée de l'examen pour l'élève libre est réduite à une seule année, ce qui renforce la dualité dans le système d'examen entre le système d'une année et le système de deux ans. Des différences importantes s’insinuent ainsi entre l'officiel et le libre dans les contenus des matières examinées. Le libre est examiné dans l'examen régional sur les matières de la deuxième année de baccalauréat, tandis que l'officiel est examiné dans l'examen régional sur les matières de la première année de baccalauréat, avec une différence claire entre les niveaux des cours. L’imbroglio qui en résulte complique le processus de correction et perturbe sa fluidité, obligeant le correcteur (le professeur) à corriger deux niveaux pour une même année certificative. De plus, l'élève libre doit passer deux examens consécutifs (régional et national), ce qui l'expose à l'épuisement et crée des différences de capacités entre lui et l'élève officiel, dont les deux examens s’étalent sur deux ans.
Le troisième effet concerne la relation supposée entre l'examen régional et l'examen national. L'analyse de cette relation montre que l'examen régional détermine souvent le parcours de l'élève, le rendant parfois incapable de se rattraper s'il obtient un mauvais résultat, faisant de cette épreuve un obstacle qui empêche injustement l'élève de se rattraper et de surmonter ses lacunes. Pareil système dévoie l’objectif des examens, qui est de servir d'outil pour évaluer et promouvoir l'élève, non de freiner et d'entraver ses capacités.
Le quatrième effet est lié à l'impact de ces examens sur l'année scolaire. Malgré l'insistance du ministère sur la nécessité de poursuivre les études jusqu'au 30 juin, le calendrier établi pour la saisie des notes dans le programme "Massar" avant les examens régionaux et nationaux oblige pratiquement à terminer les cours avant le 20 mai de chaque année. Les élèves quittent généralement la classe dès qu'ils ont passé le dernier devoir et voient leurs notes saisies dans le programme Massar, ce qui fait de cette perte de temps scolaire une politique structurelle.
Le cinquième effet concerne les difficultés des opérations de surveillance et de correction. Les examens régional et national se déroulent consécutivement, mais les opérations de correction nécessitent que les correcteurs soient libérés pour les tâches de correction de l'examen régional, ce qui entraîne des perturbations dans l'organisation de la surveillance de l'examen national. Les directions provinciales sont alors obligées de faire pression sur les directeurs des centres de correction pour accélérer les processus de correction afin de fournir un soutien à la surveillance, une situation qui se répète chaque année sans qu’une solution raisonnable, qui n’affecte pas l'efficacité de la correction, comme c’est le cas aujourd’hui, ne soit trouvée.
Le sixième point concerne l'impact du système d'examen sur les diverses opérations liées à l'accès aux institutions et aux instituts supérieurs. La longue période des examens (qui se termine généralement avant le 15 juillet de chaque année) transforme la période estivale en un cauchemar pour les familles qui courent contre la montre avec leurs enfants pour obtenir le diplôme du baccalauréat, puis passer les examens d'admission à ces institutions, en plus de l'inscription dans les résidences universitaires ou la recherche d'un logement convenable.
De nombreuses institutions et écoles supérieures organisent leur calendrier pour accueillir les nouveaux étudiants sans tenir compte du contexte des examens du baccalauréat et de ses opérations complexes, car ce qui les intéresse, c'est d'assurer leur fonctionnement normal. Pendant ce temps, les familles des élèves doivent seules supporter le prix de ces complications et l'absence de suffisamment de temps entre l'annonce des résultats et le début des concours d'entrée aux institutions et écoles supérieures.
En réalité, l'expérience de la division de l'examen du baccalauréat en deux années avec le principe de sélectionner quatre ou cinq matières pour chaque examen a prouvé son échec retentissant et son impact grave sur le système éducatif. Aujourd'hui, le ministère semble avoir deux options :
- soit maintenir le système des deux années pour l'examen du baccalauréat, en imposant le passage de l'examen dans toutes les matières et en adoptant un calendrier distinct entre l'examen régional et l'examen national (la troisième semaine de mai pour le régional et la deuxième semaine de juin pour le national). Une option qui devrait en plus imposer aux candidats libres de suivre le même système, c'est-à-dire passer le baccalauréat en deux années au lieu d'une seule, et permettre aux élèves en difficulté lors de l'examen régional de bénéficier d'une session de rattrapage en adoptant un système de choix sur demande (repasser l'examen régional l'année suivante) ;
- soit, deuxième option, revenir au système d'une seule année et d'appliquer le principe de la surveillance continue dans les niveaux précédant le baccalauréat.