chroniques
Médias : El Othmani, le vent en poupe
Depuis l’époque où Noureddine Saïl était à la tête de la chaine, l’affrontement PJD/2M ne s’est jamais démenti. Sous la primature de Abdalilah Benkirane, il s’est soldé par la décision islamiste de ne plus répondre à une question ou à une invitation de 2M. C’est visiblement sur ce terrain qu’un armistice, un cessez-le-feu, une normalisation – appelez-là comme vous voulez – est intervenue
J’ai été surpris, il y a quelques semaines, lorsque Samira Sitaïl, directeur général adjoint de 2M, a commis l’acte inhabituel de se solidariser avec Bassima Hakkaoui, ministre islamiste de la Famille, de la solidarité etc. qui avait eu du retard à l’allumage face à l’agression d’une jeune fille dans un bus à Casablanca. « C’est son droit de porter le foulard » avait écrit en substance sur sa page facebook notre nationale journaliste de la chaine de Aïn Sabaa. C’était en réaction à Omar Dahbi, directeur central des rédactions de Médi 1tv, qui a publié sur sa page facebook un texte où il s’étonne du silence de la ministre face à cette agression, se demandant s’il n’était pas en relation avec le foulard qu’elle porte. Manière métaphorique de renvoyer la ministre à son islamisme rétrograde. Ma surprise venait du fait que j’ai connu Mme Sitaïl autrement plus intransigeante avec les Islamistes. Je sais que seuls les imbéciles n’évoluent pas, néanmoins je n’étais pas au bout de mes étonnements. La seconde surprise m’a choppé en plein vol lorsque j’ai vu dans confidences de presse qu’anime Abdallah Tourabi sur 2M, Mustapha Khalfi, ancien ministre de la Communication, mais toujours porte-parole du gouvernement et ministre délégué en charge des Relations avec le Parlement. Peu importe ce qu’il a dit au cours de cette émission, l’évènement c’était sa présence sur un plateau de 2M.
Pour mémoire, c’est lui qui a porté l’étendard islamiste lors de l’élaboration des nouveaux cahiers de charge de l’audiovisuel public à l’origine d’une gigantesque polémique dont l’une des figures de proue au nom des modernistes fut précisément Samira Sitaïl. Depuis l’époque où Noureddine Saïl était à la tête de la chaine, l’affrontement PJD/2M ne s’est jamais démenti. Sous la primature de Abdalilah Benkirane, il s’est soldé par la décision islamiste de ne plus répondre à une question ou à une invitation de 2M. C’est visiblement sur ce terrain qu’un armistice, un cessez-le-feu, une normalisation – appelez-là comme vous voulez – est intervenue. Mais le tableau resterait inachevé si l’on ne fait pas attention au Telquel du 15 septembre. L’hebdomadaire, moderne pour ne pas dire moderniste, d’ordinaire peu amène à l’égard des islamistes, offre une Couv où pose un chef du gouvernement, sur fond de boiserie noble, affichant une bonne bouille souriante et sereine en contraste flagrant avec les reliefs escarpés d’un Abdallah Benkirane. L’interview que leur accorde Saâdeddine El Othmani s’étale sur dix pages. Il n’est qu’apaisement et velours. Le titre de l’éditorial que lui consacre la directrice du Magazine, Aicha Akalay, « donnons-lui sa chance », dispense de la lecture du reste. Seule la subtilité de l’auteure, ouverte sur les incertitudes, évite à l’éditorial de se transformer en un concert de violons. Enorme changement. Il a pour un nom, l’effet El Othmani et des artistes qui l’accompagnent dans la fosse de l’orchestre. C’est tout aussi bien ainsi.