chroniques
Sahara : Les préliminaires de Köhler
Une solution politique au Sahara ne serait juste, durable et mutuellement acceptable que si elle repose sur la proposition marocaine d’une large autonomie
L’allemand Horst Köhler, envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU au Sahara, s’active avec une détermination germanique. Discrètement, mais obstinément. Avec moins d’indulgence on y humerait même un parfum de zèle du néophyte. Il vient de convier, pour ne pas dire convoquer, pour décembre à Genève, Marocains, Mauritaniens, Algériens et polisariens, nom de guerre de l’armée algérienne contre le Maroc. Il en espère l’enclenchement d’un processus de négociations pour trouver une solution au conflit du Sahara. Il a fixé le 20 octobre aux composantes de la rencontre pour donner une suite à cette convocation, suggérant par là que toute réponse « négative » aurait des conséquences sur le rapport du secrétaire général des Nations Unies et la résolution du Conseil de sécurité prévue pour le 29 octobre. Ce dont il n’aura pas besoin, Rabat ayant accepté de se rendre à Genève.
L’ancien président allemand agit dans ce dossier comme s’il était sûr de son affaire, ce qui le place parfois dans des cafouillages. Sa confiance en soi lui viendrait des Américains qui seraient décidés à faire bouger cette affaire, ce qui ne serait pas une mauvaise chose si la solution envisagée à la Maison Blanche est politique, juste et mutuellement acceptable. Et elle ne saurait l’être que si elle repose sur la proposition marocaine d’une large autonomie, car, on ne le répétera jamais assez, celle-ci est une concession du Maroc à la demande de l’ONU et de l’ancien secrétaire d’Etat américain James Baker chargé un temps de trouver un compromis qui rendrait un arrangement possible. Tandis que de l’autre coté, Alger n’a pas bougé d’un iota.
L’objet de la rencontre de Genève serait exploratoire, « préliminaires », dit-on à l’ONU, des voies et moyens de dégager une solution qu’on ne cesse d’explorer. Depuis le lancement de cette invitation-convocation, Rabat observe un silence qu’on peut aisément interpréter comme l’expression d’une insatisfaction. En même temps le plafond du Maroc étant fixé et archi-connu, il n’y a peut-être pas lieu de revenir à la charge. On notera toutefois qu’ici et là on rencontre les traces d’une approche « participative » qui considère que le statut de l’Algérie dans ces réunions a évolué d’observateur vers quelque chose qui reste à déterminer.
Alger ne l’entend pas de cette oreille. Les éléments de langage qu’il a distillé en perspective de Genève restent prisonnier du « format 2+2 » qui « n’est pas discutable » ni « sujet à débattre ». Estimant rien que « l’annonce de la reprise des négociations une victoire diplomatique de grande portée », Alger pousse le bouchon un peu plus loin. Il considère que H. Köhler « évoque un chapitre résolument nouveau dans le processus onusien qu’il veut ouvrir en relançant ces négociations directes, relevant que l’autodétermination demeure réalisable sur le terrain. » Ce qui est ridicule en plus de stérile. Cette approche, si elle s’avère celle de Köhler, reviendrait à un retour en arrière qui sape ce qui a rendu les Manhasset possibles : Le constat de l’infaisabilité du référendum d’autodétermination qui a conduit à la recherche d’une troisième voie. Une recherche qui ne peut aboutir que si Alger prend la place qui est la sienne et qu’il revendique lorsqu’il assure que la question du Sahara relève de sa sécurité et de ses intérêts stratégiques.