chroniques
Un vide constitutionnel
Ni nos universitaires, ni les « experts » de l’audiovisuel, n’ont relevé les deux « trous » dans la constitution de 2011. Or ce sont ces deux « oublis » qui font que le pouvoir peut empêcher, indéfiniment, la constitution d’une coalition
La charte fondamentale, la constitution, n’a jamais été un référent au Maroc. La preuve c’est que l’USFP et l’Istiqlal ont voté oui en 1996, pour préparer l’alternance alors que le texte était régressif, un vrai recul démocratique. Mais la constitution de 20011, produit d’un contexte particulier, devait servir de base renforçant la transition démocratique et inverser la hiérarchie. Il n’est pas normal que les rapports politiciens l’emportent sur les règles cotées par le peuple. Le démocrate que je suis constate que tout le monde s’assoit dessus.
Cinq ans après son adoption, la moitié des textes organiques, les conseils consultatifs qu’elle prévoit, la participation de la société civile à la législation ne sont pas en place et ne risquent pas de l’être avec Benkirane qui lie la construction démocratique à son seul sort personnel.
Parce que je suis démocrate, que je crois à l’utilité de la constitution et à son rôle structurant, je relève deux manques sérieux, qu’il nous faut rapidement combler.
La crise dite du blocage aurait pu durer cinq ans. Le texte ne prévoit aucun délai pour le chef du gouvernement désigné en vue de constituer sa majorité. Chabat, que Dieu le comble de ses bienfaits, à réglé le problème, mais cela aurait pu durer éternellement. Dans toutes les démocraties, le chef du gouvernement a un délai qui n’excède pas les soixante jours, sinon il rend les clés.
Il y a pire, c’est qu’il n’y a pas de plan B, le Roi ne peut pas passer au parti arrivé second lors des élections, ce n’est pas prévu par le texte. Il ne peut que constater l’échec et appeler à de nouvelles élections. Problème là aussi, la dissolution ne peut être prononcée qu’une fois par an. Imaginons que l’on refasse les élections pour les mêmes résultats, on fait quoi ?
Il y a une phrase qui dit que le Roi est le garant de la bonne marche des institutions, certains y voient la possibilité pour le palais de choisir les sorties de crise qu’il veut. On retombe sur une lecture méprisante de la constitution. Celle-ci doit évoluer en comblant ses lacunes pour offrir une vraie visibilité. C’est juste le retour au conflit des légitimités. Maintenant est ce que Benkirane, Chabat, Lachgar sont capables d’atteindre ce niveau d’abstraction ? Je ne le pense pas et ils ont démontré toute leur vulgarité durant cette crise.
Cependant c’est trop facile de leur tomber dessus. Ni nos universitaires, ni les « experts » de l’audiovisuel, n’ont relevé les deux « trous » dans la constitution de 2011. Or ce sont ces deux « oublis » qui font que le « Makhzen » peut empêcher, indéfiniment, la constitution d’une coalition. Benkirane et ses 125 députés est à genoux devant le RNI et ses 37 élus. Le chemin est encore long avant la démocratie, mais tout recul serait suicidaire.