En Arabie saoudite, une semaine de la mode et du bling-bling sur une île isolée

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Des mannequins présentent des créations de la collection estivale de vêtements de plage de la créatrice marocaine Yasmina Q, lors de la Semaine de la mode de la mer Rouge sur l'île d'Ummahat, en Arabie saoudite, le 17 mai 2024. (Photo Fayez Nureldine / AFP)

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La styliste Tima Abid a fait ses débuts à une époque où les défilés de mode étaient tabous en Arabie saoudite et le tourisme quasi inexistant dans ce royaume ultra-conservateur, à l'exception des pèlerinages religieux.

La présentation cette semaine de la dernière collection de cette Saoudienne, avec des mannequins évoluant souvent la tête nue sur une passerelle au-dessus de l'eau, montre le chemin parcouru.

L'événement s'est déroulé dans un grand hôtel de luxe sur l'île d'Ummhat Alshaikh, au large de la côte ouest de l'Arabie saoudite, accessible seulement par bateau ou par hydravion.

Le défilé jeudi au coucher du soleil a donné le coup d'envoi de la première Semaine de la mode de la mer Rouge, présentée par les organisateurs comme une étape importante à la fois pour la mode saoudienne et pour un secteur touristique naissant dont la croissance est essentielle pour diversifier l'économie du premier exportateur mondial de pétrole.

Tenues aux matières soyeuses ou tissus transparents, jambes ou bras dénudés pour plusieurs modèles, certains même avec un décolleté plongeant. Le tout dans les tons blancs et beiges.

Un autre défilé vendredi a été présenté comme le premier à montrer des maillots de bain.

Rivaliser avec Dubaï 

Autant dire un changement considérable dans ce pays musulman conservateur qui exigeait il y a encore moins de dix ans que les femmes portent des abbayas, des robes recouvrant tout le corps.

"On peut dire que c'est de l'audace, mais je vois ça différemment: suivre le rythme de la mondialisation", a déclaré Mme Abid à l'AFP.

"Les restrictions qui existaient auparavant ont été abolies, et cela nous a donné l'occasion de montrer notre créativité d'une manière plus belle".

L'éventail des collections présentées a démontré que l'Arabie saoudite était bien décidée à rivaliser non seulement avec Dubaï, ville des Emirats arabes unis voisins, mais aussi avec d'autres capitales de la mode, a déclaré Lojain Omran, présentatrice saoudienne de l'émission "Bonjour le monde arabe", qui assistait au défilé.

"Si vous voulez atteindre un public international dans le domaine de la mode, vous devez toucher tous types de personnes, les conservateurs et ceux qui sont à l'opposé", a-t-elle ajouté.

Le complexe où a lieu le défilé, avec des villas en bord de mer à près de 2.000 dollars la nuit, fait partie de Red Sea Global, l'un des méga-projets au cœur d'un ambitieux programme de réformes initié par le prince héritier Mohammed ben Salmane et connu sous le nom de Vision 2030.

Les plages et leurs palmiers sont considérées comme de potentielles attractions majeures, et la Semaine de la mode de la mer Rouge était en partie destinée à mettre en valeur ce qui existe déjà, a déclaré Burak Cakmak, directeur général de la Commission saoudienne de la mode.

"Il est évident que sur le plan logistique, nous tentons quelque chose de très nouveau (...) sur une île isolée", a-t-il déclaré.

Promouvoir le tourisme 

"J'aimerais que tout le monde explore non seulement le design saoudien, mais aussi l'Arabie saoudite en tant que destination", dit-il.

En assistant aux préparatifs du défilé de Mme Abid, la styliste saoudienne Alanoud Badr a lancé que c'était "quelque chose auquel on ne s'attendait pas". "Rien à envier aux Maldives!", dit-elle.

L'Arabie saoudite multiplie les investissements dans la mode et le tourisme, alors même que la guerre qui oppose Israël au mouvement palestinien Hamas dans la bande de Gaza réduit les perspectives de croissance économique pour l'ensemble de la région.

Mais l'industrie du tourisme en Arabie saoudite doit aussi faire face à des critiques récurrentes concernant la situation des droits humains dans le royaume du Golfe, notamment la répression de toute dissidence sous le règne du prince héritier Mohammed Salmane.

Le mannequin Beatris Resende, qui a grandi au Brésil, a confié avoir souvent vu le Moyen-Orient comme une région qui n'était pas dépeinte de manière très flatteuse.

Ce n'est qu'en voyageant et y en faisant du mannequinat que la jeune femme en est venue à l'apprécier. "Je vais être honnête. Je veux vraiment que les gens arrêtent d'avoir des stéréotypes pour les pays et qu'ils apprennent à mieux les connaître", a-t-elle dit. (AFP)

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