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Un mois de novembre au Maroc – Par Seddik Maaninou
En 2017, Le roi Mohammed a présidé à Fès, la cérémonie marquant l’achèvement du programme de restauration et de réhabilitation de 27 monuments historiques, dont cinq Medersas, anciennes écoles traditionnelles où était enseigné depuis des siècles, la science et le savoir
Un mois plein de déplacements.
Je l’ai commencé à Fès et l’ai terminé à Tétouan, en célébrant le 49e anniversaire de la Marche Verte.
L’Université Al-Qaraouiyine
À Fès, et sur invitation de « Fondation Maroc Patrimoine », j’ai assisté à une conférence donnée par le professeur Amel Jalal, doyen de la faculté Al-Qaraouiyine. L’intervenant a évoqué l’histoire de la plus ancienne université au monde, les réformes qu’elle a connues au fil des siècles, et la continuité de l’enseignement qui s’y est déroulé depuis plus de mille ans.
Il a rappelé que, parallèlement aux différentes études islamiques, cette université a été le cadre d’enseignement de plusieurs disciplines, notamment la médecine traditionnelle et moderne pour former des cadres responsables de la gestion des hôpitaux (maristans), notamment à l’époque des Mérinides.
Al-Qaraouiyine a également enseigné la pharmacie à base de plantes médicinales, les mathématiques pour former les juges et notaires en charge de la gestion des successions complexes, ainsi que l’histoire, la sociologie, la géographie et l’astrologie, utiles pour déterminer la qibla, les horaires de prière et les itinéraires des caravanes.
Des étudiants du Maroc et de l’étranger, musulmans, juifs et chrétiens, ont fréquenté cette université. Ils en sont sortis diplômés pour diffuser son savoir dans le monde entier. C’est l’exemple d’Al-Idrissi, qui a mis en forme la première carte du monde, d’Ibn Battouta le voyageur et ses périples extraordinaires à travers les continents, d’Ibn Khaldoun célèbre auteur de Al-Muqaddima (Prolégomènes) et fondateur de la sociologie, d’Ibn Rochd (Averroès) passeur de l'aristotélisme, baptisé le Commentateur, reconnu comme l’un des maîtres de la pensée rationnelle, et autres Ibn Bajjah, cadi Iyad, l’Andalou Ibn Al-Khatib, et tant d’esprits brillants qui ont étudié ou se sont inspirés d’Al-Qaraouiyine.
Le Palais des congrès
Toujours à Fès, cette fois sur invitation de l’« Association Fès-Saïs », j’ai donné une conférence sur la Marche Verte. En arrivant à la salle des conférences, mes souvenirs m’ont ramené à ce lieu emblématique qui a accueilli des sommets et des réunions du Comité Al-Qods sous la présidence du défunt Hassan II. C’est dans cette salle que fut fondée l’Académie du Royaume du Maroc le 21 avril 1980, sous la présidence de son fondateur, Sa Majesté le roi Hassan II.
Contrairement à mes conférences précédentes, j’ai commencé par rappeler les événements marquants qu’a traversés le Maroc au cours du dernier siècle : les causes de l’entrée des forces coloniales, la résistance du peuple marocain, la création du mouvement national et la rédaction des documents revendiquant l’indépendance, rédigés à Fès par des diplômés d’Al-Qaraouiyine.
J’ai mis en lumière les dangers de la triple alliance, de jure ou de facto, contre l’unité territoriale marocaine, notamment l’alliance de l’Algérie révolutionnaire avec le régime fasciste de Franco et une Mauritanie hésitante, obligeant le Maroc à faire face à ces complots.
Tétouan et la Marche Verte
Ensuite, sur invitation du conseil municipal de Tétouan, je me suis rendu à la colombe blanche. J’ai visité une exposition regroupant des centaines de documents datant de l’époque du protectorat espagnol et d’avant, portant sur l’état civil, les transactions commerciales, et le rôle remarquable de la communauté juive dans cette ville.
J’ai également visité la vieille médina, arpenté ses ruelles étroites et découvert de nombreux vestiges témoignant du riche passé de cette ville, surnommée parfois « la petite Grenade ».
Devant une élite composée de doyens, parlementaires, élus et universitaires, j’ai donné une conférence sur la Marche Verte, en soulignant la renaissance culturelle, créative et journalistique qu’a connue Tétouan dans les années 1930. À cette époque, neuf journaux et magazines y étaient publiés, et la ville vivait au rythme d’une activité culturelle et théâtrale intense, lui conférant une place de choix.
J’ai rappelé que la première revendication d’indépendance est partie de Tétouan, où fut créée la « Koutla d’action nationale », avant celle du sud dans la zone sultanienne. J’ai également mis en avant le rôle de Tétouan dans le soutien à la résistance armée marocaine lors de l’exil de Mohammed V, accueillant des résistants et acheminant des armes aux combattants. Les premières unités de l’Armée de Libération marocaine ainsi que des unités de l’Armée de Libération algérienne sont nées dans les environs de la ville.
En conclusion, j’ai insisté sur l’importance des préparatifs logistiques de la Marche Verte, notamment pour assurer un million de pains quotidiens et de millions de mètres cube potable, mettant en avant l’unité et la solidarité marocaines qui ont permis cette grande réussite.
Fès et Tétouan : Reflets d’un patrimoine ancestral
Dans les ruelles de Fès et de Tétouan, on ressent une similarité entre les deux villes, reflet du génie marocain dans la cohabitation, la créativité, et la préservation du patrimoine matériel et immatériel.
Sur instructions de Sa Majesté le roi Mohammed VI, les deux médinas historiques ont été restaurées et réhabilitées, devenant des musées à ciel ouvert de la civilisation marocaine dans toute sa diversité. Cela permet de se promener dans la même ambiance que les anciens Marocains, il y a plusieurs siècles. Fès et Tétouan restent des témoignages vivants de la richesse et de la profondeur de l’histoire marocaine.