De l’Amazighité et de l’identité nationale

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On peut y arriver sans rêver de jeter quiconque à la mer

Sur les réseaux sociaux les passions se déchaînent et beaucoup de bêtises sont proférées autour de la question Amazigh. Jeter les arabes à la mer ? Ce n’est pas nouveau. Maître Adghani avait pronostiqué que « l’Islam qui est entré par l’épée sortira par l’épée » et ce depuis plus de vingt ans. En même temps, ceux qui accusent les militants identitaires de sionisme et fantasment sur l’identité arabo-musulmane du Maroc n’ont rien compris.

Cette terre est Amazighe, c’est indiscutable. Mais elle a connu des mélanges non pas uniquement avec les Bani-Hilal, mais aussi avec les négro-Africains et les andalous entre autres et auparavant avec les romains et les différents conquérants qui ont traversé la Méditerranée. Le fait que le Maroc s’est détaché du califat très tôt, aurait pu nous permettre de penser cette identité plurielle. Elle a été plutôt vécue, supportée, que théorisée. Le malheur a voulu que le nationalisme nous installe dans la sphère arabo-musulmane alors que la chute des ottomans consacrait les états-nations.

Le mouvement amazigh marocain, dans sa grande majorité, s’inscrit dans une démarche nationale. Ses démarches ne sont pas uniquement culturelles mais aussi sociales, sociétales et politiques. Il est faux, absolument faux de dire que ces revendications sont attentatoires à l’unité nationale. Par contre ce courant est réellement porteur de modernité si nous arrivons collectivement à mettre en pratique une conception rénovée de l’identité plurielle, dans toutes ses dimensions.

La conception « arabo-musulmane » est stigmatisante sur les  deux dimensions. Même s’il n’y a plus que quelques milliers de juifs, le judaïsme est une composante de l’identité marocaine. Dans les contrées Amazighes où il y a eu peu de mélanges, l’Islam est très fortement présent mais avec de survivances ancestrales anté-Islamique.

Cette conception ne correspond à aucune réalité et pousse à la radicalisation du mouvement Amazigh. Celui-ci a commis une erreur historique en choisissant le Tifinagh au lieu des caractères latins. Il a choisi une voie sans issue, la preuve c’est que l’on n’enseigne toujours pas la langue Amazighe, au lieu d’être une ouverture vers nos voisins européens.

Maintenant la question Amazighe se pose dans tout le grand Maghreb mais avec des différences notables. Au Maroc, soussis, rifains, et zayans n’ont pas la même culture et une bonne moitié des Amazighs vivent dans les villes. En Algérie, les Kabyles sont restés attachés aux montagnes ou sont partis à l’étranger. Ils ont été trahis par le FLN qui a assassiné Abbane Ramdane puis Krim Belkacem, deux héros de la révolution. En Libye ils sont tout simplement victimes de racisme.

Mettre le Maroc au même niveau que ses voisins c’est nier la particularité, le vécu, mais aussi les luttes et les conquêtes. Certains ex-gauchistes pensent que l’internationale Berbère va remplacer l’internationale communiste et sont donc dans les excès et l’outrance au détriment de revendications justes.

Il n’est pas normal qu’un justiciable Amazigh soit obligé de s’exprimer dans une langue qu’il ne maîtrise pas, même après la nouvelle constitution. L’injustice dans la dépense publique est inacceptable par les disparités régionales qu’elle crée. Enfin, les traditions même anté-Islamique, sont dignes de respect. On peut y arriver sans rêver de jeter quiconque à la mer.