Au début fut la chronique. Celle consacrée à une mystérieuse stèle funéraire, une légende à l’histoire aujourd’hui encore inachevée qui taraudait depuis longtemps Abdeljalil Lahjomri, attisant chaque jour un peu plus sa curiosité. Jusqu’à ce que le confinement survienne, permettant enfin au Secrétaire perpétuel de l’Académie du Royaume de s’y consacrer pour révéler la part du légendaire et de l’historique que renferme cette stèle qu’un étrange orifice de douze centimètres de diamètre rend plus énigmatique. 

Cette chronique, le Quid.ma l’a publiée en trois parties. C’est elle qui est’ donc, à l’origine de ce riche ouvrage, coédité par l’Académie du Royaume et Quid.ma, conçu pour être pratique, qu’une femme peut mettre dans son sac et un homme dans sa poche pour le lire, chacun à sa guise, où elle (il) veut, quand elle (il) veut. 

^{Un ouvrage qui parle de Rabat d’aujourd’hui en remontant à ses sources, en déambulant dans sa mémoire et ses quartiers.} 

Pour reprendre le commentaire d’un lecteur averti, Larbi Belafkih, Abdejlil Lahjomri nous a « fait plonger dans les méandres historiques d’un site ‘’r’bati’’ que tant de visiteurs apprécieront différemment à la suite de la lecture des trois parties [de la chronique] ». Ce commentaire résume le débat fructueux autour de cette étude documentée mais personnalisée de l’histoire de Chella, qui a permis au Secrétaire perpétuel de l’Académie du Royaume de faire apparaitre Rabat pour ce qu’elle est, la plus impériale des villes impériales du Royaume car «modelée par l’ensemble des civilisations qui ont marqué de leur empreinte l’histoire du pays ». 

Ce travail a débouché sur une autre chronique, un retour au présent où l’auteur propose de faire des Oudayas un écomusée et de Chella un musée à ciel ouvert. Mû par le souci de l’opérationnalité, il ne propose pas seulement. Il décline également pourquoi et comment ces deux sites peuvent retrouver leur place de leviers du développement touristique et, aussi et surtout, d’épanouissement culturel et mémoriel. 

Dans un autre écrit, Dessine-moi un jardin, Abdejlil Lahjomri s’attendrit sur ses souvenirs des Jardins d’Essais, dont il se saisit pour inviter à ce que l’on fasse de ce sublime espace « un parcours poétique, où les sensations visuelles et l’émotion esthétique voltigeraient des fleurs aux sculptures, des sculptures aux fleurs, où les collections végétales rares et précieuses qui y survivent encore, s’ajouteraient aux collections artistiques que nos artistes y déploieraient […]. » 

Les fouilles dans les mystères de Chella pouvaient-elles échapper à la digression ? Cela aurait été trop facile. Et c’est ainsi que de Chella, on a bifurqué par la Conférence d’Anfa de 1943 à Casablanca, en pleine Seconde guerre mondiale. Histoire d’évoquer le peu d’égard que l’on a longtemps eu pour notre patrimoine national. 

Les voies imprévisibles de la quête ont mené l’auteur sur les traces à Chella de l’artiste- peintre Jilali Gharbaoui, qui a marqué les débuts des arts plastiques au Maroc. Une découverte qu’il fallait vérifier. La confirmation, que le lecteur trouvera dans cet ouvrage, est venue, depuis Paris, de Mustapha Saha.  

La publication de ces chroniques a donc suscité un riche débat sur la question du patrimoine et donné lieu à plusieurs réactions. Le lecteur en trouvera des passages dans un article-écho à la fin de la première partie de ce petit et dense livre.

La belle aventure aurait pu s’arrêter là. On en aurait gardé un goût d’inachevé et, sans prétendre clore le travail sur une ville qui est apparue au fil de la lecture recelant des trésors patrimoniaux insoupçonnés, d’autres chroniques, déjà publiés ou inédites, sont venues diversifier les pistes et, en même temps, raviver les souvenirs et nourrir la nostalgie. C’est la deuxième partie qui porte le titre éloquent de : « Chronique des temps (presque) heureux ».

Mais l’appel au souvenir n’est qu’un prétexte, un recul pour mieux sauter vers l’avenir de ce qu’est en train de devenir la capitale du Royaume, un chantier ouvert, voulue par le Roi Mohammed VI « Ville Lumière, capitale de la Culture ». C’est que cette publication qui aura l’heur de plaire aux amoureux des secrets de l’Histoire, serait incomplète si elle ne s’inscrivait pas dans la perspective plus large de rendre à Rabat ce qui appartient à Rabat. 

Si, en collaboration avec l’Académie du Royaume du Maroc, on édite cette recherche et les chroniques qui l’accompagnent, c’est que Rabat, vous l’aurez compris, en dépit de son statut et de son histoire, est si mal connu. C’est un jalon à ajouter aux autres travaux sur la capitale du Royaume, en espérant qu’il s’intensifiera tant il est nécessaire à la construction de l’avenir. Mais au-delà de celui-ci et du présent, c’est le passé-fondement qui guide cette ambition d’en savoir plus sur cette ville et sur ses gens pour aller à la découverte de Rabat avant « Ribat Al Fath ».

Sur ce point, le Secrétaire perpétuel de l’Académie du Royaume du Maroc est catégorique : « L’histoire ne pourrait rester ainsi muette ».

Dans un texte extrait d’un autre ouvrage - Patrimoine et esprits des lieux, Rabat - repris dans l’ouvrage en guise de préface, Abdejlil Lahjomri explique cette grande ambition : « Quelques parts dans cette immense zone qu’est Tamesna, encore enfouis sous une terre de plus en plus urbanisée, subsistent sûrement des vestiges qui ne demandent qu’à nous conter la prodigieuse légende des contrées qui avaient, « Sala », ou « Chella », aujourd’hui Rabat, comme capitale. »