Culture
L'Académie du Royaume, autant en emporte la Chine
Rabat – Le Secrétaire perpétuel de l'Académie du Royaume du Maroc, Abdeljalil Lahjomri a affirmé, lundi à Rabat, que dans le cadre de la promotion des échanges scientifiques et de l'ouverture sur les expériences pionnières dans le domaine de la modernisation, l'Académie n'hésite pas à solliciter des pays lointains afin de mieux les connaître et de bénéficier de leurs expériences dans tous les domaines.
Dans une intervention à l'ouverture de la 46e session de l'Académie, tenue sur le thème "L’Asie comme horizon de pensée", M. Lahjomri a souligné que l'Académie veille sur la participation de chercheurs et de spécialistes éminents venus de différents pays asiatiques sur une période de six jours. Il s'agit de la Chine (9 et 10 décembre), de l'Inde (11 et 12 décembre) et du Japon (16 et 17 décembre), le but étant d'étudier les expériences de modernisation et de développement dans ces pays.
M. Lahjomri a souligné qu'en s'ouvrant sur les recherches et les études spécialisées, et en accueillant des experts et des stratégistes d'Asie, d'Europe, d'Afrique et de la région arabe, l'Académie cherche à échanger des expériences et à développer la recherche dans divers domaines de la connaissance et ce, dans un esprit de conscience de l'importance de la localisation géographique et stratégique du Maroc et de son rôle de passerelle entre les nations et les civilisations.
Concernant le premier axe de la session: "Chine .. Expériences de modernisation et de développement", M. Lahjomri a souligné que le choix de la Chine découle du fait que "l'Histoire et le positionnement géographique de ce pays lui ont permis d'occuper une position de leader sur la scène internationale, outre son influence effective en Asie", ainsi que ses réformes économiques et son ouverture.
Dans ce sens, a-t-il poursuivi, le Maroc continue de partager avec la Chine son expérience et son expertise accumulées dans le cadre de ses partenariats bilatéraux afin de réaliser une coopération tripartite riche et diversifiée avec la Chine et l'Afrique sur la base d'un partenariat gagnant-gagnant.
Pour sa part, Mohamed Kettani, Chancelier et membre de l'Académie du Royaume, a noté que l'Académie poursuit, à travers cette session, son quête de découverte de l'Asie, plus imposant continent en termes de population et de diversité religieuse et idéologique, et en tant qu'"horizon de pensée et source d'enseignements de par le cumul d'expériences qui lui a permis d'occuper une place de choix dans le concert des nations".
De son côté, Rahma Bourkia, membre de l'Académie, a évoqué dans son allocution l'importance de la dimension historique dans la relation entre la Chine et l'Afrique, soulignant que cette relation sereine constitue un facteur de puissance dans la construction d'une destinée commune de l'Humanité, ajoutant que, partant de cette idée de partage, et étant donné la volonté de la Chine et de l'Afrique de consolider leurs relations, il devient impératif de créer un nouveau modèle international de développement et de coopération au service des sociétés et des individus, qui sert le rapprochement dans l'ère de l'émergence de la Chine et de la renaissance de l'Afrique.
Pour sa part, l’Ambassadeur de la Chine au Maroc, Li Li, s'est réjoui que cette session puisse mettre en avant une thématique sur l’Asie regroupant des intellectuels et des experts en matière de modernisation, afin consolider l'échange en connaissance entre la Chine et le Maroc, en réponse aux aspirations des deux pays.
La réflexion touchera, au cours de cette session, les réformes constitutionnelles, les alliances stratégiques, l'élaboration et la mise en œuvre de politiques de développement axées sur l'industrie et le commerce, la définition des priorités dans les domaines de l'éducation, de la santé, de la planification urbaine et de l'environnement ainsi que la restructuration de la fonction publique et des agences gouvernementales.
A noter que l'Académie du Royaume avait organisé une série de sessions portant sur "l'Afrique comme horizon de pensée" en 2015, "De la modernité aux modernités" en 2017, et "L'Amérique latine comme horizon de pensée" en 2018.
Académie du Royaume: Des chercheurs discutent des expériences de développement en Chine axées sur l'industrie, le commerce et les échanges humains
La Chine, la réforme tout azimut
Par ailleurs des chercheurs ont échangé, lundi à Rabat, sur les expériences de modernisation et de développement menées en Chine avec comme dénominateur commun l'industrie, le commerce et les échanges humains ainsi que les réformes constitutionnelles et l'évolution du nouveau modèle économique chinois.
Intervenant dans le cadre de la première séquence de la 46ème session de l'Académie du Royaume du Maroc placée sous le thème "l'Asie comme horizon de pensée: Chine, expériences de modernisation et de développement", les intervenants ont mis l'accent sur les importantes réformes entreprises par l'État chinois notamment dans les domaines de l'agriculture, de l'industrie et de la technologie, depuis le lancement entre 1977 et 1982 des "Quatre modernisations", soulignant les énormes sauts "qualitatifs" que l'Empire du milieu a réalisés depuis une trentaine d'années et sa quête d'un modèle de développement efficient à même de favoriser l'émergence.
Dans sa communication intitulée "les trois dimensions de la compréhension de l'avenir partagé de l'humanité: perspective asiatique", le directeur de l'Institut des affaires internationales et du Centre d'études européennes à l'Université Renmin en Chine, Yiwei Wang a mis en avant les dimensions permettant de comprendre la société en vue d'aboutir à un destin partagé pour l'humanité et dépasser la crise identitaire.
"Au-delà des principes de souveraineté et de respect de l'identité, la civilisation chinoise pourrait apporter des solutions aux crises identitaires afin d'ériger une solidarité plus accrue entre toutes les civilisations du monde dans un climat de partage, de paix et d'harmonie", a-t-il noté.
M. Wang a, dans ce sens, appelé à construire un monde interconnecté afin de réduire les fossés entre les nations et l'écart entre les pays du Nord et du Sud, indépendamment des croyances, des confessions ou de la couleur de la peau, relevant que pour atteindre un destin commun, il faut trouver un équilibre mondial économique, basé sur la sécurité inclusive et commune (financière, alimentaire...) et promouvoir des partenariats tout en incarnant le concept de communauté de destin pour l'humanité, celui de l'initiative de la Nouvelle route de la soie.
De son côté, M. Jin Liangxiang, chercheur à l'Institut de Shangai pour les études internationales, a focalisé son intervention sur deux domaines dans lesquels son pays essaye de relever les défis liés à la modernisation, à savoir la politique foncière et la mise en place d'un gouvernement central fort.
Dans son article "Deux cas réussis de modernisation en Chine peu observés", M. Liangxiang a souligné les efforts consentis par la Chine pour faire face aux travailleurs migrants en vue de leur permettre de préserver leurs terres à l'ère de l'industrialisation, mettant en avant les avantages d'un gouvernement central et fort dans le processus de modernisation à travers la mise en place d'un réseau national d'autoroutes et de voies ferrées et la création de mécanismes d'assistance, notamment en cas de séisme.
Cet expert du Moyen-Orient a en outre mis en évidence le rôle de la Chine et sa contribution en terme de développement dans la région, qui se veut une source d'énergie et un marché d'investissement, de même que sa politique basée sur le respect de l'identité civilisationnelle, l'ouverture, l'échange et la coexistence.
Pour sa part, le chef de l'Unité Asie à l'Institut des relations économiques internationales à Athènes (République Hellénique), Plamen Tonchev, s'est attardé sur le modèle économique chinois, son évolution, sa trajectoire et les différentes approches adoptées, particulièrement depuis l'époque marquée par les "Quatre modernisations".
Dans son intervention intitulée "Évolution de la Chine vers un nouveau modèle économique: de la croissance quantitative à la croissance qualitative, M. Tonchev a mis l'accent sur les défis auxquels le développement et la croissance chinoise sont confrontés et leur impact sur l'environnement.
Il a, dans ce contexte, indiqué que l'objectif de la Chine est de passer à un développement rapide, plus qualitatif, par le biais de la promotion d'une économie fondée sur les énergies propres, ajoutant qu'en termes de compétitivité, une importance particulière est accordée à l'innovation, à l'éducation de qualité et au renforcement des capacités et à la formation professionnelle.
Le professeur de littérature et d'histoire à l'Université Tsinghua de Chine, Wang Hui, a consacré son exposé à l'histoire contemporaine de la Chine, les différentes mutations et développements survenus dans le pays afin d'en faire un modèle pour les peuples du monde face aux défis de la mondialisation.
Dans son intervention intitulée "Repenser l'ère des réformes dans la perspective de la Chine du 20ème siècle", il a braqué les projecteurs sur l'émergence de la Chine en partant d'une perspective historique axée sur les caractéristiques de l'Emplire du Milieu du 20ème siècle, la révolution de 1911, la révolution culturelle et la post-révolution.
A travers cette 46-ème session, l'Académie tente d'explorer les forces du changement qui façonnent l'Asie et comprendre les processus qui ont conduit ce continent vers des expériences de modernisation. Ce continent riche par sa diversité et source d'inspiration regroupe en son sein un large éventail de systèmes de gouvernance, de mécanismes de développement économique, de traditions, de religions, de ressources, de langues, de cultures et de compositions démographiques.
Le continent asiatique confirme aujourd'hui sa position d'acteur incontournable de la scène internationale avec trois pays qui ont intégré le top 5 des puissances économiques à savoir la Chine, le Japon et l'Inde, notant que ces trois géants asiatiques ont atteint le niveau qu'on leur connait et prétendent à aller encore plus loin en basant leur politique sur trois éléments essentiels érigés en priorités nationales, à savoir l'éducation et la formation, la recherche scientifique et les nouvelles technologies.
La première séquence de cette session qui se poursuit jusqu'au 10 décembre 2019 a comme thème principal la Chine, la deuxième séquence du 11 et 12 décembre sera consacrée à l'Inde, tandis que la troisième dédidée au Japon est prévue les 16 et 17 décembre.